samedi 16 décembre 2017

RWANDA/ Plateforme "P5"/ COMMUNIQUE DE PRESSE nº 013/2017/ RÉFÉRENCE FAITE A L’ARRET DE LA COUR AFRICAINE DES DROITS DE L’HOMME ET DES PEUPLES, LA PLATEFORME DEMANDE LA LIBÉRATION SANS CONDITION DE VICTOIRE INGABIRE UMUHOZA



COMMUNIQUE DE PRESSE nº 013/2017

RÉFÉRENCE FAITE A L’ARRET DE LA COUR AFRICAINE DES DROITS DE L’HOMME ET DES PEUPLES
LA PLATEFORME DEMANDE LA LIBERATION SANS CONDITION DE VICTOIRE INGABIRE UMUHOZA

Le 13 décembre 2013,  la Cour Suprême condamnait injustement Victoire Ingabire Umuhoza Présidente des FDU-Inkingi à 15 ans de prisons. Après avoir épuisé tous les recours au Rwanda sans qu’elle obtienne justice, Mme Victoire Ingabire Umuhoza, Présidente des FDU-INKINGI a fait appel à la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (CADHP) en tant que Cour chargée de trancher les multiples violations des droits de l’homme pour que la requérante soit rétablie dans ses droits. L’ARRET de la Cour a reconnu qu’elle avait été lésée dans ses droits et libertés fondamentales.

La Cour a en effet affirmé que la Requérante n’a pas propagé ni laissé entendre la théorie du double génocide, ni l’idéologie génocidaire, ni minimisé le génocide commis contre les Tutsi dans sa déclaration à Gisozi. Elle n’a pas non plus propagé des rumeurs en vue d’inciter la population à se soulever contre les autorités existantes. Les déclarations de la requérante, a renchéri la Cour, sont prévisibles dans une société démocratique et devraient être tolérées surtout lorsqu’elles proviennent d’une personnalité publique comme la Requérante. Selon la Cour la culpabilité et la condamnation y relative de la Requérante constituent donc une restriction à sa liberté d’expression aux termes de l’article 9 (2) et l’article 19 (3) du PIDCP.

La Cour a également conclu que le droit de la défense du requérant prévu à l’article 7 (1) (c) de la charte a été violé.

A la lumière des avis et considérations, ainsi que des conclusions de la CADHP, la plateforme exige la libération sans conditions de Mme Victoire Ingabire Umuhoza pour qu’elle soit rétablie dans ses droits.

La plateforme rappelle que le régime du FPR continue à utiliser abusivement les articles 461 et 463 du code pénal rwandais pour bâillonner l’opposition et continuer à fermer l’espace politique. C’est dans ce contexte que les cadres des FDU-Inkingi ont été raflés en Septembre 2017 et que Melle Diane et Mme Adeline Rwigara sont actuellement emprisonnées.

La plateforme P5 demande aux sponsors du régime du général Kagame, et plus particulièrement  les Pays-Bas, la Grande Bretagne, la Belgique, les USA et l’UE, de faire pression pour que tous les prisonniers politiques et d’opinion arrêtés sur cette base soient libérés sans conditions.
Fait à Bruxelles le 16 Décembre  2017

Jean-Baptiste Ryumugabe
Président de la  Plateforme P5
Phone: +32.486.46.0824

RWANDA/ Plateforme "P5"/ MÉMORANDUM DE LA PLATEFORME POLITIQUE P5 SUR LA SITUATION DES DROITS DE L’HOMME AU RWANDA / DÉCEMBRE 2017



Life prisoners – all Hutu – in Muhanga (formerly Gitarama) Prison are, according to the Global Research caption, regularly “hung, cuffed and crucified.” (La vie des prisonniers, tous hutu, dans la prison de Muhanga (anciennement appelée prison de Gitarama) sont régulièrement pendus, menottés et crucifiés, selon l’enquête menée par Global Research).





Bruxelles, Décembre 2017



Par ce mémorandum, la PLATEFORME P5, coalition composée de 5 principales organisations politiques de l’opposition démocratique rwandaise : Amahoro PC, FDU - Inkingi ; PDP - Imanzi ; PS Imberakuri et Rwanda National Congress (RNC), tient à partager ses inquiétudes avec le Parlement Européen face à une situation explosive des droits de l’homme qui se développe chaque jour au Rwanda.

Le Rwanda fait actuellement partie des 47 Etats membres du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies.  Le Rwanda a également mis en place beaucoup d’infrastructures légales et institutionnelles pour montrer au monde que c’est un pays respectueux des libertés publiques et droits de la personne. Ainsi, devant les instances internationales, le Rwanda serait un élève modèle à suivre en matière de respect des droits de l’homme. Mais en vérité, la réalité est toute autre. Derrière ce parfum de baume que constitue le soi-disant respect des droits de l’homme, se cache un visage mensonger caractérisé par l’hypocrisie, le double langage et les violations flagrantes des droits des citoyens tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du Rwanda. Ces violations se caractérisent plus particulièrement par des meurtres prémédités dirigés contre les figures de l’opposition démocratique et de la population ordinaire, la clôture complète de l’espace politique, la spoliation des biens publiques au profit d’une petite Elite au pouvoir ; les politiques économiques et sociales trop ségrégationnistes et une législation taillée sur mesure pour soutenir la dictature qui caractérise la gouvernance rwandaise.

Les violences politiques que le Rwanda connait, ne sont pas une fatalité due à une haine congénitale entre les hutu et les tutsi, mais plutôt le résultat de la politique d’exclusion politique, économique et sociale de certains groupes ethniques, que l’Elite politique a exploitée pour se hisser au pouvoir. Le Rwanda n’a jamais connu une situation politico sociale aussi explosive que maintenant. Face à ces violations planifiées et soutenues par l’Etat Rwandais, le Rwanda présente un cas d’étude où les conditions sont réunies pour une révolte populaires sanglante dans un avenir proche.

La plateforme P5 lance un appel pressant à tous les hommes, femmes, institutions et gouvernements épris de paix et de liberté afin qu’ils épaulent ses efforts pour empêcher l’éventualité d’une catastrophe humaine de l’ampleur, et même d’ampleur plus grave que le génocide de 1994. La PLATEFORME espère que le Parlement Européen examinera le présent mémorandum en vue de contribuer à la recherche de solutions adéquates pour prévenir la catastrophe humanitaire qui pourrait résulter de l’inaction ou du silence face au désastre humanitaire plus détaillé dans le mémorandum. 
 
La Plateforme P5 considère que la présente analyse permettra au Parlement Européen de mieux appréhender les causes profondes qui interpellent la conscience de tout un chacun à soutenir et protéger les droits de l’homme au Rwanda contre un régime tyrannique du Front Patriotique Rwandais (FPR) qui exerce le pouvoir en place au Rwanda ; et à la tête duquel règne le président Paul Kagame.

TABLE DES MATIÈRES

1.     Introduction 


La plateforme P5, Coalition composée de 5 principales organisations politiques de l’opposition démocratique rwandaise : Amahoro PC, FDU - Inkingi ; PDP - Imanzi ; PS Imberakuri et Rwanda National Congress (RNC), salue les efforts du Parlement Européen dans sa contribution à la recherche de solutions appropriées pour parer aux graves violations des droits de l’homme dans le monde et plus particulièrement au Rwanda.

Le Rwanda fait actuellement partie des 47 Etats membres du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies.  Il a ratifié la Convention Contre la Torture et Autres Traitements Cruels, Inhumains et Dégradants. Par ordonnance du Président n° 60/01 du 12 février 2014, le Rwanda a aussi ratifié le Protocol Facultatif à cette convention adopté par l’Assemblée Générale des Nations Unies le 18 décembre 2002.

La lutte contre la torture est donc devenue partie intégrante du Code Pénal Rwandais qui fait de la torture un crime punissable. Toutes les infrastructures légales (ex. Constitution, Traités internationaux et autres lois) et institutionnelles (ex. Commission Nationale des Droits de la Personne, NHRC) ont été mises en place pour montrer au monde que le Rwanda est un pays respectueux des libertés publiques et droits de la personne. Ainsi, devant les instances internationales, le Rwanda serait un élève modèle à suivre en matière de respect des droits de l’homme. Mais en vérité, la réalité est toute autre. Derrière ce parfum de baume que constitue le soi-disant respect des droits de l’homme, se cache un visage mensonger caractérisé par l’hypocrisie, le double langage et tout un tas d’autres manœuvres machiavéliques.

La situation des droits de l’homme au Rwanda est tellement grave à tel enseigne que la communauté internationale assume une grande responsabilité en y restant insensible telle qu’elle pourrait conduire à une autre catastrophe humanitaire. Il y a trois ans, le rapporteur Spécial des Nations sur le droit d’expression et d’association, Mr. Maina Kiai, a signalé, à juste titre, dans son rapport au Conseil des Nations Unies sur les droits de l’homme en Juin 2014 qu’ « Une société sans espace pour que les voix critiques s’expriment librement et pacifiquement est intenable » ".

Nous lançons un appel pressant à tous les hommes, femmes, institutions et gouvernements épris de paix et de liberté afin qu’ils épaulent nos efforts pour empêcher une telle éventualité.

Rappelons qu’au moment où les grandes puissances faisaient une réflexion sur les causes et solutions aux guerres cycliques dans le monde, il a été reconnu, comme cela a été repris dans le Préambule de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme que :
-        La reconnaissance de la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine et de leurs droits égaux et inaliénables constitue le fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde ;
-        La méconnaissance et le mépris des droits de l'homme ont conduit à des actes de barbarie qui révoltent la conscience de l'humanité ;
-        L’avènement d'un monde où les êtres humains seront libres de parler et de croire, libérés de la terreur et de la misère, a été proclamé comme la plus haute aspiration de l'homme et qu’il est :
-        Essentiel que les droits de l'homme soient protégés par un régime de droit pour que l'homme ne soit pas contraint, en suprême recours, à la révolte contre la tyrannie et l'oppression.

Dans ce contexte, le Rwanda présente un cas d’étude où les conditions sont réunies pour une révolte. Cependant l’histoire récente du Rwanda nous interpelle tous à faire tout ce qui est en notre pouvoir pour empêcher cette éventualité.

La PLATEFORME P5 réitère ses remerciements au Parlement Européen qui, 
par sa Résolution n°2016/2910(RSP) du 6 octobre 2016, 
a permis d’apporter une certaine clarté dans les conditions de détention 
de Madame Victoire Ingabire Umuhoza, présidente des FDU-Inkingi 
en tant que prisonnière politique qui était antérieurement consignée 
dans l’isolement avec toutes sortes de tortures physiques, morales ou psychologiques. 
Mais hélas, même si elle est détenue dans les mêmes conditions que les autres prisonniers 
aujourd’hui, elle est toujours victime de torture psychologique à l’intérieure de la prison.  
La nouvelle tactique adoptée par le régime comprend l'isolement, l'enlèvement de tous 
les effets personnels minimaux auxquels elle avait encore droit (livres, bible…) 
et l'interdiction de parler aux autres prisonniers.
 
Le 24 novembre 2017 la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples[1] 
a confirmé que beaucoup de violations des droits de Madame Victoire Ingabire avaient 
été commis ; beaucoup de chefs d’accusations sur base desquels elle a été condamnée 
étaient en violation flagrante de ses droits d’expression et ses droits politiques.
 
La PLATEFORME P5 revient donc de nouveau vers le Parlement Européen pour lui faire partager ces inquiétudes en vue d’une recherche de solutions, les conditions déplorables dans lesquelles le peuple rwandais plie désespérément sous le joug d’une féroce dictature qui n’a cure de graves violations des droits de l’homme sous le regard silencieux de la communauté internationale.

Les violences politiques que le Rwanda a connues, ne sont pas une fatalité due à une haine congénitale entre les hutu et les tutsi, mais plutôt le résultat de la politique d’exclusion politique, économique et sociale de certains groupes ethniques, que l’Elite politique a exploitée pour se hisser au pouvoir. Le Rwanda n’a jamais connu une situation politico sociale aussi explosive que maintenant.

Partant de ce principe, la Plateforme P5 considère que la présente analyse permettra au Parlement Européen de mieux appréhender les causes profondes qui interpellent la conscience de tout un chacun à soutenir et protéger les droits de l’homme au Rwanda contre un régime tyrannique du Front Patriotique Rwandais (FPR) qui exerce le pouvoir en place au Rwanda.

La Plateforme P5 considère que les violences auxquelles est soumis le peuple rwandais sont tolérées par la communauté internationale d’une part à cause d’une auto-culpabilisation collective de ne pas avoir intervenu durant le génocide rwandais. Or ce fut au FPR par ses émissaires Gérard Gahima et Claude Dusaidi[2] qui ont expressément demandé aux Nations Unies de ne pas intervenir. Pour le reste les lobbies du FPR l’ont aidé à commercialiser ce chèque en blanc du génocide pour garantir son impunité.

2.     La communauté internationale face au mensonge du FPR 


Devant les graves violations des droits de l’homme au Rwanda, la communauté internationale garderait-elle un silence complice ou serait-elle de bonne foi, victime du mensonge du régime du FPR ?

Le 10 Octobre 2017, Human Rights Watch a déclaré que l’armée du Rwanda a régulièrement arrêté illégalement et torturé des détenus, en recourant à des passages à tabac, des asphyxies, des simulacres d’exécution et des décharges électriques.[3] Comme à l’accoutumée, le régime de Kagame a nié tout en bloc.  Un parlementaire a même insulté le CEO de HRW, Mr. Kenneth Roth, le désignant comme “ un chien interahamwe féroce ” (imbwa y’interahamwe intozo). Pourtant une enquête de RFI a démontré avec un audio-vidéo à l’appui que le mensonge du FPR était flagrant.[4]

Dans son rapport sur les droits de l’homme au Rwanda pour 2016, le Département d’Etat Américain a fait remarquer qu’à cause des restrictions aux droits civils ; des restrictions à l'enregistrement et au fonctionnement des partis d'opposition, les citoyens ne sont pas capables de changer leur gouvernement par des élections libres et équitables. En substance le rapport fait état de « tueries arbitraires ou illégales; torture;  harcèlement, arrestation et abus des opposants politiques, des défenseurs des droits de l'homme et des individus perçus comme menace  au pouvoir en place et à l'ordre social; de non-respect des règles de l’état de droit par les forces de sécurité ;  des restrictions aux droits civils; des restrictions à l'enregistrement et au fonctionnement des partis d'opposition, ce qui ne permet pas aux citoyens de changer leur gouvernement par des élections libres et équitables." Les rapports des organisations des droits de l’homme tels que Amnesty International, Human Rights Watch font le même constat.

Le rapport de Freedom House 2015 considère le Rwanda comme "non libre". Le rapport de Reporters Sans Frontières 2015 classe le Rwanda au 161eme rang sur 180 pays en termes de liberté des médias, derrière les pays qui ont également été dévastés par la guerre tels que le Liberia 89 - Sierra Leone 79 - Afghanistan 122, Soudan du Sud 125, Palestine 140, Burundi 145 ; RDC : 150 et Irak 156.

Une équipe de spécialistes en sciences sociales dirigée par le Professeur Andreas Wimmer de l'UCLA, a classé le Rwanda parmi les pays ayant le niveau le plus élevé d'exclusion politique dans le monde (derrière le Soudan et la Syrie). L'équipe a passé près de trois ans à étudier les relations inter- ethniques dans 155 pays de 1946 à 2005, en utilisant des conseils d'experts auprès de près de 100 spécialistes des universités du monde entier.

La plus grande tragédie pour le pays est que le régime actuel a instrumentalisé une calamité nationale, i.e. le génocide, comme un chèque en blanc pour éliminer ses opposants politiques, envahir ou déstabiliser par rebellions interposés, un pays voisin entrainant la mort de plus de 5 millions de personnes, la plus importante catastrophe humanitaire depuis la deuxième guerre mondiale. La complaisance ou même la complicité de la communauté internationale devant cette tragédie est écœurante et vide la teneur du concept de l’humanité.

La politique d’apaisement n’a fait que renforcer la confiance et la conviction du régime en place que la violence est un outil acceptable de gestion du pouvoir. Il s’est donc développé une culture de la violence parmi les services de sécurité. Le rapport du Commonwealth Human Rights Initiative a décrit le Rwanda comme « une armée avec un état au lieu d’être un état avec une armée ».

La reconnaissance de la dignité inhérente à tous les membres de l’espèce humaine, la liberté de parler et de croire n’ont plus de place au Rwanda. Ironiquement le régime totalitaire et répressif Rwandais reste l’enfant chéri des bailleurs de fonds.
Un changement démocratique n’est pas imminent pour sortir du tunnel. Après avoir forcé la population à changer la constitution pour lui permettre de s’accrocher au pouvoir sans partage pour encore 17 ans, il est gros à parier que sous le régime FPR la répression va s’accélérer suite aux revendications grandissantes des forces démocratiques pour une société libre, un peuple réellement réconcilié et un progrès économique partagé.

3.     Les atteintes au droit à la vie et à l'intégrité physique

La protection et le respect de la vie, qu'elle soit celle d'autrui ou même sa propre vie, constituent les fondamentaux, les valeurs et les piliers de base de la civilité et du droit humanitaire. Toute personne qui s'attaque à ces valeurs se rabaisse au rang de l'animalité. Quels que soient les motifs et les ambitions – qu’ils soient d’ordre politique, économique, ethnique ou socio-culturel- qui animent certaines autorités ; rien ne peut justifier le recours aux attentats contre la vie ou à toutes sortes d'atteintes au droit à la vie et à l'intégrité physique de la personne humaine. 
Les Nations Unies ont créé une Sous-commission chargée de contrôles réguliers de la mise en application du Protocole relatif à la Torture, par des personnalités internationales indépendantes et des organisations nationales sur les lieux de la détention en vue d’assurer la prévention de la torture et autres traitements cruels, inhumains et dégradants. Le Conseil des Droits de l’Homme des Nations-Unies a dernièrement envoyé au Rwanda une mission, à savoir la Sous-commission des Nations-Unies pour la prévention contre la Torture (SPT) et qui devait y séjourner du 15 au 21 octobre 2017.

La SPT a dû interrompre sa mission et quitter le Rwanda bien avant la fin de sa mission en raison d'obstacles dressés par les autorités et de crainte que des personnes interrogées puissent être victimes de représailles.

En effet, l’article 6, c du statut du Tribunal militaire international de Nuremberg inclut l’assassinat politique parmi les actes qualifiés de crime contre l’humanité : « Les actes suivants, ou l'un quelconque d'entre eux, sont des crimes soumis à la juridiction du Tribunal et entraînent une responsabilité individuelle :
6.c. (c) “ Les Crimes contre l'Humanité ': c'est-à-dire l'assassinat, l'extermination, la réduction en esclavage, la déportation, et tout autre acte inhumain commis contre toutes populations civiles, avant ou pendant la guerre, ou bien les persécutions pour des motifs politiques, raciaux ou religieux, lorsque ces actes ou persécutions, qu'ils aient constitué ou non une violation du droit interne du pays où ils ont été perpétrés, ont été commis à la suite de tout crime rentrant dans la compétence du Tribunal, ou en liaison avec ce crime.
Les dirigeants, organisateurs, provocateurs ou complices qui ont pris part à l'élaboration ou à l'exécution d'un plan concerté ou d'un complot pour commettre l'un quelconque des crimes ci-dessus définis sont responsables de tous les actes accomplis par toutes personnes en exécution de ce plan.”

Les assassinats politiques commis au Rwanda ne peuvent être qualifiés autrement que des actes inhumains commis pour des motifs politiques et qui rentrent parfaitement dans le cadre d’un plan d’élimination des opposants politiques définis dans le discours du 5 juin 2014 que le chef de l’Etat a prononcé devant la population à Nyabihu[5] . Dès lors, le caractère d’attaque systématique dirigée contre la population civile relevant de l’opposition ne pourrait être mis en doute.

Le Code Pénal Rwandais définit en ses articles 120 et suivants, l’assassinat politique comme étant un crime contre l’humanité :

Le crime contre l’humanité s’entend de l’un des actes suivants commis dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique dirigée contre la population civile en raison de son appartenance nationale, politique, ethnique ou religieuse :
1° meurtre ;
2° extermination ;
3° réduction en esclavage ;
4° déportation ou transfert forcé de population ;
5° emprisonnement d’une personne ou privation grave de sa liberté de mouvement en violation de la loi ;
6° torture ;
7° viol, esclavage sexuel, prostitution forcée, stérilisation forcée et toute autre forme de violence sexuelle de gravité comparable ;
8° persécution d’une personne en raison de son appartenance politique, ethnique, religieuse ou en raison de toute autre forme de discrimination ;
9° disparitions forcées des personnes ;
10° crime d’apartheid ;
11° autres actes inhumains de caractère analogue causant intentionnellement de grandes souffrances ou des atteintes graves à l’intégrité physique ou mentale.

Le discours de Nyabihu du 5 juin 2014 correspond parfaitement aux critères définis pour l’application de l’article 120, 8° du Code Pénal Rwandais.

Article 121 : Répression du crime contre l’humanité 

 « Toute personne qui commet un crime contre l’humanité prévu aux points 1°, 2°, 3°, 6°, 7° et 9° de l’article 120 de la présente loi organique est passible d’une peine de réclusion criminelle à perpétuité.
Toute personne qui commet un crime contre l’humanité prévu aux points 4°, 5°, 8°, 10° et 11° de l’article 120 de la présente loi organique est passible d’un emprisonnement de dix (10) ans à vingt-cinq (25) ans.
Lorsque le crime contre l’humanité prévu à l’alinéa 2 du présent article est accompagné de traitements inhumains et dégradants, l’auteur est passible de la réclusion criminelle à perpétuité ».

4.     Les assassinats extrajudiciaires : politiques ou autres


Nous relevons ci-après, à titre indicatif et non exhaustif, quelques exemples typiques d'assassinats politiques ou extra judiciaires perpétrés sur des ressortissants rwandais et qui, à notre avis et jusqu’à présent (jusqu’à preuve du contraire), n’ont pas fait l’objet de poursuites : 


1.      Jean Damascène Habarugira assassiné sauvagement le 5 Mai 2017. Il était membre du Parti FDU-Inkingi. Jean Damascène Habarugira appartenait à un parti de l’opposition et aurait protesté contre la destruction des cultures vivrières des paysans soi-disant pour faire place au projet d’intérêt publique.

2.      Trois enfants brulés vifs dans l’un des caniveaux de Kigali le 28 Avril 2017 par des personnes en uniformes, soupçonnées d’être les agents de l’ordre.

3.      Innocent Nshimiyimana, fils de Mr. Simon Buhinja et de Mme Gaudence Nyirankundimana, du village Rebero, cellule Munanira secteur Nyamyumba District de Rubavu Province de l’Ouest. Il a été tué par balle le 1er Décembre, 2016 par un militaire. Il était soupçonné d’avoir volé un régime de banane.  

4.      Jean Claude Nzabonimana, District de Ngoma a été tué par balle le 5 Décembre, 2016 par la Police. Il était soupçonné   d’avoir volé un ordinateur.

5.      Rukundo fils de Mr. Hitimana and Mme Nyirampuguje, village Cyeza, Secteur Munanira, Cellule Nyamyumba, District de Rubavu, Province de l’Ouest a été tué par les militaires le 6 Décembre 2016. Il était soupçonné d’être voleur de bétail.

6.      Samson Musonera, 22 ans et Jean Claude Bizabarimana 24 ans, village Nyamuremure, secteur Kigombe, cellule Muhoza, District de Musanze, Province de l’ouest étaient tués le 7 Décembre 7, 2016. Ils ont été arrêtés à leur domicile par les agents de sécurité qui étaient accompagnés par le secrétaire exécutif du village, Mr Gahutu Antoine. Ils ont été poignardés et sont morts des suites de leurs blessures.

7.      Channy Mbonigaba a été tué par balle le 18 août 2016 par la Police Nationale. La Police a annoncé qu’elle avait tué un terroriste à Nyarutarama ; faubourg de la ville de Kigali.

8.      Le 19 Août 2016, La Police Nationale a déclaré qu’elle avait tué trois terroristes dans le secteur de Bugarama, District de Rusizi. Elle a annoncé également le 20 Août 2016, qu’elle avait tué deux personnes dans le même district soupçonnées d’être des terroristes.

9.      L’avocat de Kigali Toy Nzamwita Ntabwoba a été tué par la police le 30 Décembre 2016, sur une barrière à Kigali au bord de son véhicule. La raison avancée fut qu’il avait refusé de s’arrêter.

10.  Le journal local « Izuba Rirashe » du 12/05/2015 a annoncé le décès de Mr Gisagara Bernard, résident de la cellule de Nyarubungo, secteur de Ngarama, district de Gatsibo, tué par les agents de l’administration locale qui l‘accusaient de ne pas avoir payé l’assurance médicale.

11.  En mai 2015, des informations concordantes ont rapporté le cas d’Alfred NSENGIMANA, ancien Secrétaire Exécutif du secteur CYUVE, District de MUSANZE, castré et puis fusillé par la police. Cet ancien Secrétaire Exécutif qui était accusé de collaborer avec l’opposition au régime, a subi les pires tortures : au moment de sa levée de corps, le supplicié n’avait plus ni les yeux, ni les dents, ni les ongles. En plus, son sexe avait été coupé. De telles pratiques, de la part de services de sécurité supposés appartenir à un pays digne de ce nom, sont exaspérantes pour le genre humain.
   
12.  Assassinat d’Emmanuel Musirikare  

En date du 11 octobre 2014, Emmanuel MUSIRIKARE, qui résidait dans la cellule Cyembogo, secteur Matimba, District de Nyagatare, a été tué par la police locale en collaboration avec Madame MUKARUGWIZA, responsable de la cellule Cyembogo, et en présence du chef de police des secteurs Matimba et Kagitumba. 

La femme de MUSIRIKARE, madame UWAMAHORO a été sauvagement battue alors qu'elle était enceinte. Elle a dû être hospitalisée. A sa sortie de l'hôpital, elle a tenté sans succès de réclamer justice pour l'assassinat de son mari : au lieu de la soutenir et de l'aider à constituer un dossier pénal, la Police a préféré jeter en prison les témoins présents à la scène du crime, d'autres témoins oculaires ont dû prendre la fuite vers l'Ouganda. Ceux qui sont restés ont été intimidés de manière que personne ne puisse dénoncer ce meurtre. Le prétexte officiel du meurtre est que feu MUSIRIKARE aurait possédé chez lui du « warage », une boisson alcoolisée d'origine ougandaise dont le commerce et la consommation sont interdits.  Mais les fouilles effectuées chez lui à cet effet n'ont rien prouvé. Nous ne connaissons toujours pas le sort réservé à ceux qui ont été mis en prison, mais à ce jour, ce qui est certain, est qu’il n'y a pas eu de poursuites contre les auteurs de l'assassinat de feu MUSIRIKARE.
 
13.  Assassinat de Chadrack Niwungize  

Monsieur Chadrack NIWUNGIZE était un enseignant dans une école du District de Rutsiro en Province de l'Ouest du Rwanda. Il a été arrêté chez lui sans mandat d'arrêt le 2 avril 2015 par le responsable exécutif du district de Rutsiro, accompagné d'un milicien DASSO (District Administration Security Support Organ). 

Le 5 avril 2015, les autorités du district ont ramené le corps de NIWUNGIZE et l'ont remis à sa famille sans autre explication. De source sûre, Monsieur NIWUNGIZE a été assassiné sous prétexte qu'il collaborait avec des opposants au régime du FPR, qui sont considérés comme des ennemis du pays.  A ce jour, aucune poursuite n'a été exercée contre les auteurs de ce crime. 

14.  Assassinat d’André Kagwa Rwisereka  
Monsieur KAGWA RWISEREKA était le vice-président du parti politique GREEN PARTY. Son corps presque décapité, a été retrouvé dans une vallée près de Butare le 14 juillet 2010.   A ce jour, aucun des auteurs de ce crime n'a été traduit en justice. 

15.  Assassinat du docteur Emmanuel Gasakure

Le docteur Emmanuel GASAKURE, ancien cardiologue en chef de l'Université de Nancy en France, était un universitaire faisant partie d'une équipe de recherche européenne et propriétaire d'une clinique privée en France. Après le génocide de 1994, il rentre au Rwanda. Il reconstruit l'hôpital universitaire de Butare et relance la Faculté de médecine. Il restructure tout le système de santé et met en place le système des mutuelles. En 2001, il devient conseiller principal et médecin personnel du président Paul KAGAME. Parce qu'il combattait la corruption dans les hautes sphères du pouvoir, il fut accusé de toutes sortes de maux dont l'amitié avec Patrick KAREGEYA, les contacts avec RNC, l'abus d'alcoolisme et de violation de secret médical. Il fut mis en détention à la station de police de Remera à Kigali le 20 février 2015, et exécuté le 25 février 2015. Il aurait donc été tué pour collaboration avec des opposants au régime du FPR, qui sont considérés comme des ennemis du pays.   Les auteurs de ce crime n'ont pas été inquiétés.

16.  Assassinat du major John Sengati

Le major John SENGATI fut garde de corps du général KAYUMBA NYAMWASA depuis 1993 à 2001. Après la fuite du général KAYUMBA NYAMWASA en 2007, il fut reproché au major SENGATI qui était déjà en retraite, d'être en relations avec son ancien patron. En 2012, il fut mis en détention pendant cinq mois, et puis relâché mais il fut assigné à résidence surveillée. Le 10 mai 2013, il est assassiné. Il aurait donc été tué pour collaboration avec des opposants au régime du FPR, qui sont considérés comme des ennemis du pays. Les auteurs de ce crime n'ont pas été inquiétés.

17.  Mme Illuminée  Iragena

Madame Illuminée IRAGENA était infirmière à l’Hôpital Roi Fayçal à Kigali. Elle fut portée disparue le 26 mars 2016 en se rendant au service. Le jour de son arrestation, elle aurait été accusée d’avoir dédicacé à quelqu’un le livre de Madame Victoire INGABIRE UMUHOZA, présidente des Forces Démocratiques Unifiées (FDU Inkingi). De sources dignes de foi, elle aurait été torturée jusqu’à ce qu’elle meure de ces traitements cruels, inhumains et dégradants. A présent, le régime du FPR n’a montré ni son corps, ni infirmé la véracité de ces dires. La victime a donc été tuée pour collaboration avec des opposants au régime du FPR, qui sont considérés comme des ennemis du pays. Les auteurs de ce crime abominable n’ont pas été inquiétés.

18.  Assassinat de Patrick Karegeya  
En date du 1er janvier 2014, Colonel Patrick KAREGEYA, ancien Chef des services de renseignement extérieur du Rwanda, a été assassiné dans un hôtel à Johannesburg. Il avait fui le pays en 2007 et vivait en exil en Afrique du Sud. Comme le général KAYUMBA NYAMWASA, il accusait le président Paul KAGAME d'être responsable de l'attentat qui, en avril 1994, a coûté la vie au président Juvénal Habyarimana. Tout comme KAYUMBA NYAMWASA, il se disait prêt à rencontrer le juge français Marc TREVIDIC, en charge de l'enquête.  

Colonel KAREGEYA était l'un des fondateurs et haut-cadre du parti politique d'opposition RWANDA NATIONAL CONGRESS (RNC). Au moment où le gouvernement sud-africain menait des enquêtes sur l'assassinat de Patrick KAREGEYA, le Président Paul KAGAME a déclaré, en date du 12 janvier 2014, que « nul ne peut trahir le Rwanda et s'en sortir vivant ». 

19.  Assassinat d’Erik Hakizimana

Il a été fusillé par la police sous prétexte qu’il aurait cherché à s’évader de la prison. Néanmoins, les autres détenus témoignent en disant que lorsqu’il a été introduit en prison, il avait déjà reçu des coups et blessures. La police l’aurait alors fait sortir pendant la nuit pour aller le fusiller juste derrière la prison.

5.     Tentatives d'assassinat


5.1.        Tentative d'assassinat du Général Kayumba Nyamwasa 


Le général KAYUMBA NYAMWASA est un homme qui fut très proche du président Paul KAGAME. Il fut l'un des fondateurs du FPR et chef d'état-major de l'armée rwandaise depuis 1994 à 2002 ; et par après ambassadeur du Rwanda en Inde après avoir été responsable des services de sécurité Rwandaises. Par la suite, il a demandé asile en Afrique du Sud.  
Membre fondateur du parti d'opposition RWANDA NATIONAL CONGRESS- RNC, il a survécu le 19 juin 2010 à une tentative d'assassinat. Tout comme Patrick KAREGEYA, le général KAYUMBA NYAMWASA était et reste toujours prêt à témoigner contre le président Kagame d’être responsable de l'attentat qui, en avril 1994, a coûté la vie au président Juvénal HABYARIMANA.

            
Au mois d'août 2014, un tribunal d'Afrique du Sud a condamné à huit ans de prison ferme deux Rwandais et deux Tanzaniens reconnus coupables de ce crime. Une deuxième tentative d'assassinat du général KAYUMBA NYAMWASA a échoué en date du 4 mars 2014. C'est par suite à cet incident que l'Afrique du Sud a expulsé de son territoire 4 diplomates rwandais. Dès lors, la communauté internationale a condamné cette campagne d'assassinats politiques.
  
Rappelons que d'autres assassinats politiques avaient déjà eu lieu auparavant dont notamment celui du Colonel Théoneste LIZINDE, ancien député national assassiné avec Mr. Augustin BUGIRIMFURA au Kenya en 1997 et celui de Mr. Seth SENDASHONGA, qui fut Ministre de l'Intérieur dans le premier gouvernement du FPR, assassiné à Nairobi au Kenya en 1998.
   

5.2.        Tentative d'assassinat d’Éric Nshimyumuremyi

Le 15 septembre 2011, alors qu’il rentrait chez lui après avoir participé au procès de Mme Victoire INGABIRE, Mr. Eric NSHIMYUMUREMYI, président du parti PS Imberakuri dans le district de Kicukiro a été grièvement blessé par balle par la police. Il a par la suite été présenté par la police comme quelqu'un qui portait une arme à feu sans autorisation.  Il n’a jamais été soigné convenablement   car la balle tirée sur lui loge toujours dans sa poitrine.  Les médecins ont observé que ses   poumons sont atteints, et a commencé à développer des problèmes liés à la   respiration.

Bien avant qu’il ne soit transféré au tribunal le 08 novembre 2011, Mr Eric NSHIMYUMUREMYI a été à plusieurs reprises approché par la police afin de le convaincre d’accepter qu’il possédât une arme à feu. C’était la condition que la police lui imposait pour qu’il puisse être autorisé à se faire soigner. L’objectif poursuivi par la police était de monter un dossier de possession d’armes sans autorisation à charge des responsables du parti PS IMBERAKURI, Me Bernard NTAGANDA, président, et Mr Alexis BAKUNZIBAKE, premier vice-président faisant fonction de président du parti, en vue de les accuser de tentative d’assassinat de Mme Christine MUKABUNANI, que le FPR continue toujours d’utiliser pour tenter de détruire le parti PS IMBERAKURI. Par ailleurs, la demande d'expertise de l'arme du crime demandée par son avocat a été classée sans suite par la justice.

6.       Les disparitions forcées[6]   


L'interdiction absolue des disparitions forcées fait partie du droit international coutumier. La Cour Pénale Internationale (CPI) a intégré cette interdiction dans son statut et considère la disparition forcée comme un crime. 

Au Rwanda, les disparitions forcées sont monnaie courante et non considérées comme un crime. En effet, le Code Pénal Rwandais stipule que " tout agent de l’État qui met ou maintient une personne en détention sans un ordre juridique est passible d’une peine d’emprisonnement égale à la durée de la détention illégale de la personne". Un acte de disparition forcée n’est pas encore défini comme un crime au regard du droit national, bien que le Code Pénal reconnaisse les disparitions forcées comme l’un des actes qui peuvent constituer un crime contre l’humanité.

Une recommandation avait pourtant été faite au Rwanda en 2011 à l'occasion de l'examen périodique universel du Conseil des  droits de l'homme de l'ONU relativement à la ratification de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées; mais force est de constater qu' à ce jour le pouvoir en place fait la sourde oreille et continue à pratiquer sans gêne des disparitions forcées sur les rwandais aussi bien ceux de l'intérieur que ceux de l'extérieur du pays.

Dans certains cas, le sort des personnes concernées est encore inconnu plusieurs semaines plus tard. Selon des enquêtes menées par Human Rights Watch, certaines victimes sont appréhendées par l'armée ou par les autorités locales ou nationales. Certaines personnes disparues de force auraient été détenues parce qu'elles étaient soupçonnées d'être des complices des forces démocratiques pour la libération du Rwanda(FDLR) ou de collaborer avec elles. Et dans ce cas, le gouvernement rwandais et la police menacent aussi ou maltraitent les proches de la personne. 
A titre d'exemple, reprenons un cas relevé par Human Rights Watch :  

Plusieurs témoins ont déclaré à Human Rights Watch dans son rapport de 2014 qu’ils avaient vu aux dates citées de 2013, une autorité gouvernementale locale et des militaires des RDF appréhender certaines des personnes qui ont disparu.  
Le 16 avril, deux chefs de village, Elie Semajeri et Shamusi Umubyeyi, ainsi qu’un médecin traditionnel, Jean-Bosco Bizimungu, ont été arrêtés dans les quartiers de Kabuga, Majengo et Ihuriro du secteur de Gisenyi. Des résidents locaux ont déclaré que des militaires, ainsi que le secrétaire exécutif du secteur de Gisenyi, Honoré Mugisha, ont appréhendé ces personnes près de leur domicile. Des témoins ont également mentionné Mugisha dans le cadre d’autres disparitions.  
Le 8 mai, Mugisha a déclaré à Human Rights Watch qu’il avait entendu des rumeurs à propos de ces accusations portées contre lui, mais il a affirmé qu’il ne les comprenait pas. Il a soutenu que le 16 avril, il se trouvait à Ruhengeri, une ville à plus d’une heure de Gisenyi, pour rendre visite à sa mère malade, et il a ajouté qu’il n’avait appris la disparition des deux chefs de village que le 18 avril.  
Pourtant, six témoins ont confirmé séparément à Human Rights Watch que Mugisha a été personnellement impliqué dans les arrestations le 16 avril. Des témoins ont déclaré à Human Rights Watch que lorsque des habitants ont contesté l’arrestation de Shamusi Umubyeyi, Mugisha a affirmé qu’il en prenait la responsabilité et a déclaré : « Nous allons lui poser quelques questions et puis nous la relâcherons. » De même, Mugisha a assuré à une personne proche de Semajeri : « Il doit répondre à quelques questions, puis nous le relâcherons. » 

6.1.        Cas de Madame Marie Claire  Uzamukunda

Madame Marie Claire UZAMUKUNDA, chef de service Administratif et Financier de l’hôpital de Rwamagana en province de l’Est du Rwanda, a été malignement enlevée à la gare routière de Nyabugogo, banlieue de Kigali le 24 janvier 2016.

Selon le journal « Ubworoherane.com », Madame Marie Claire UZAMUKUNDA a quitté son domicile situé dans le district de Gicumbi à Byumba vers 16h40 en empruntant un moyen de transport en commun jusqu’à la gare routière de Nyabugogo. Il était prévu qu’un véhicule de l’hôpital vienne la chercher à la gare.  Juste quelques minutes avant l’arrivée du véhicule, Madame Uzamukunda reçoit un coup de fil de quelqu’un qui se présente comme chargé de son assurance et lui fixe un point de rencontre derrière la gare. Pendant qu’elle se pointe au lieu de rendez-vous, son chauffeur l’appelle pour l’informer de son arrivée. Madame Uzamukunda lui demande de se rendre à Remera, sur la route qui mène vers Rwamagana, et de l’y attendre. Le chauffeur se rend à Remera et l’y attend, pendant des heures. Il essaie de la joindre par téléphone mais en vain car elle n’est plus joignable.   La disparition forcée de Madame Uzamukunda durera cinq mois sans que personne ne sache ce qui lui est arrivé.

6.2.        Cas Mr. Aimable Sibomana Rusangwa

Il sied aussi de toucher un mot sur la disparition de Mr. Aimable SIBOMANA RUSANGWA, secrétaire particulier du président du PS IMBERAKURI qui est porté disparu depuis le 13 juin 2010 vers 20h00 alors qu’il rentrait chez lui à Nyamirambo, Kigali. Son cas a été présenté à Mr. Maina KIAI, Rapporteur Spécial sur les droits à la liberté de réunion pacifique et d’association lors de sa première visite à Kigali en janvier 2014.  Réagissant à son rapport n° A/HRC/26/29/Add.2 and A/HRC/26.29/Add.3 dans son chapitre V, page 12, paragraphe 41, le gouvernement de Kigali argue qu’il n’a jamais été saisi de ce cas.

Or, le parti l’a dénoncé à plusieurs occasions. Et, en réaction à cette note du gouvernement, son parti a produit le 13 juillet 2014 deux lettres signées pour accusé de réception. L’une a été adressée le 27 février 2012 aux Ministres de l’intérieur et de l’administration locale et à celui de la sécurité intérieure et la deuxième du 27 mai 2012 était adressée au Président de la République.

Dans la plupart des cas, l’affaire est ainsi close et il n'y aura plus de trace de la personne portée disparue.  Les disparitions forcées des rwandais ne se font pas uniquement à l'intérieur du pays mais aussi à l'extérieur. Quelques exemples pourraient éclairer.

6.3.        Cas du Lieutenant Joël Mutabazi

En août 2013, à l'occasion d'une visite du président Paul KAGAME en Ouganda, le lieutenant Joël MUTABAZI, ancien membre de sa garde présidentielle pendant plus de 20 ans, a été kidnappé le 20 août 2013 et ramené au Rwanda dans un véhicule, dit-on, faisant partie de l'escorte présidentielle. L'intéressé a été jugé et condamné pour collaboration avec les FDLR et RNC. Il purge une peine de prison à perpétuité au Rwanda.

6.4.        Cas de Mr. Aimé Ntabana


Aimé NTABANA, ex-garde du corps du président Paul KAGAME, avait trouvé asile en Ouganda, a été kidnappé en mai 2013 par des personnes faisant partie des réseaux rwandais de renseignement.  Monsieur NTABANA était le fils adoptif du Colonel Patrick KAREGEYA. Son enlèvement est intervenu quelques temps après celui de Mr. Innocent KALISA qui avait été, lui aussi, membre de la garde présidentielle et garde du corps du président Paul KAGAME.

6.5.        Cas Mr.Jean Chrysostome Ntirugiribambe

Le 23 juin 2015, monsieur Jean Chrysostome NTIRUGIRIBAMBE, ancien enquêteur rwandais près le Tribunal Pénal International pour le Rwanda (TPIR) et près la Cour pénal internationale (CPI) de la Haye, a été kidnappé au Kenya pendant qu'il faisait ses courses au marché de Nairobi devant l'immeuble situé sur Tana Kamiti Road. Trois hommes armés l'ont forcé à entrer dans leur véhicule immatriculé KBUO2OE pour une destination inconnue. Quelques jours plus tard, suite aux protestations que la société civile de l'extérieur a adressées au Ministère Public (Parquet) du Kenya, les médias rwandais ont signalé la présence de l'intéressé au Rwanda. Dès lors, plus de nouvelles.

6.6.        Cas de Mr. Emile Mr. Gafirita


La disparition de Mr. J. Chrysostome NTIRUGIRIBAMBE avait été précédée huit mois plus tôt, par celle d'un certain GAFIRITA Emile, survenue presque de la même façon à Nairobi, alors qu'il devait comparaître comme témoin de la défense, devant le juge français Marc TREVIDIC, relativement à l'affaire portant sur l'assassinat du président Juvénal Habyarimana. Depuis cette disparition, il n'y a jamais eu de nouvelles le concernant.  

6.7.       Cas de Mr. Samuel Hitimana

Membre des FDU Inkingi, originaire de Rusizi en province de l’Ouest, Monsieur Samuel HITIMANA venait de terminer ses études universitaires au KIST. Il a été mis en prison pour cause de manifestations. En 2014, il a été acquitté par jugement, puis libéré mais il n’a pas pu arriver à son domicile où l’attendaient sa femme et son enfant. Il a ainsi été porté disparu, et à ce jour, il n’y a jamais eu de nouvelles de lui.

6.8.       Cas de Mr. James Nigirente

Membre du parti PS Imberakuri originaire de Rusizi en province de l’Ouest, Monsieur James NIGIRENTE est sorti de son domicile à Kigali le 9 janvier 2014 pour aller rendre visite à un ami résidant à Nyamirambo. Il n’est pas arrivé chez son ami, et sa famille ne l’a plus revu. Malgré les recherches, in ‘y a plus eu de nouvelles de lui.

6.9.        Cas de Mr. Damien Bazimaziki


Membre du parti PS Imberakuri a été enlevé par la police de recherches criminelles (CID) mais jusqu’à présent ni sa femme ni ses enfants ne savent pas ce qu’il est advenu de lui car la police nie savoir où il se trouve.

6.10.     Cas de M. Jean Damascène Iyakaremye

De même que Rusangwa Sibomana, M. Iyakaremye J. Damascène a été kidnappé par la police du Rwanda alors qu’il se trouvait à Kampala. Personne ne connaît le sort qui lui aurait été réservé.


6.11.     Cas de M. Eugène Siborurema


Membre du parti FDU Inkingi, Eugène Siborurema est originaire de Nyanza. Il a été enlevé de chez lui par la police. Celle-ci nie savoir où il se trouve.

6.12.     Cas de M. Valens Nsabimana


M. Nsabimana Valens était avec Messieurs Rusangwa Sibomana Aimable et Nsabimana Valens à Kampala lorsqu’ils ont été kidnappés par la police du Rwanda. Personne ne connaît leur sort depuis leur arrestation et enlèvement. Leurs familles ont mené des recherches auprès du CID qui affirme ne pas être au courant.

6.13.     Cas de M. Jean Damascène Munyeshyaka


Monsieur Munyeshyaka Jean Damascène est originaire du district de Nyanza, secteur Rwabicuma en province du Sud. Il est porté disparu et personne ne sait où il se trouve malgré les recherches effectuées par sa famille.


6.14.     Cas de M. Phocas Habiyaremye


Monsieur Habiyaremye Phocas est aussi originaire du district de Nyanza, secteur Rwabicuma en province du Sud. Il est porté disparu et personne ne sait où il se trouve malgré les recherches effectuées par sa famille.

6.15.     Cas de M. Serge Ndanyuzwe


Monsieur Ndanyuzwe Serge est de même originaire du district de Nyanza, secteur Rwabicuma en province du Sud. Il est porté disparu et personne ne sait où il se trouve malgré les recherches effectuées par sa famille.



6.16.     Cas de M. Emmanuel Kamanayo

Monsieur Kamanayo Emmanuel est originaire du district de Nyanza, secteur Rwabicuma en province du Sud. Il est porté disparu et personne ne sait où il se trouve malgré les recherches effectuées par sa famille.

6.17.     Cas de M. Jean Paul Habimana


Monsieur HABIMANA Jean Paul est originaire du district de Nyanza, secteur Rwabicuma en province du Sud. Il est porté disparu et personne ne sait où il se trouve malgré les recherches effectuées par sa famille. Tout comme pour Munyeshyaka,  Habiyaremye, Ndanyuzwe et Kamanayo, la police nie sa présence entre ses murs.

6.18.     Cas de M. Dominique Shyirambere


Arrêté le 25 mars 2013 devant la Cour Suprême alors qu’il voulait assister au procès de Madame Victoire Ingabire Umuhoza, Dominique Shyirambere fut mis en détention provisoire de 30 jours sous prétexte qu’il avait un badge sur lequel figurait une photo de Victoire Ingabire avec un T-shirt portant l’inscription de « Démocratie ». Après un périple juridique, il fut libéré par jugement en juin 2013, et puis porté disparu.


7.       L'enrôlement forcé  

En vue de ses différentes campagnes à l’Est de la RDC, le Rwanda a continué à enrôler, très souvent contre leur gré, des milliers de jeunes rwandais. Malgré les pertes de vies humaines sur le terrain des guerres absurdes continuellement réactivées par le pouvoir de Kigali, des campagnes ont continué à être menées dans les différents coins du Rwanda en 2013 et 2014. Ce phénomène n’a pas manqué d’inquiéter des observateurs crédibles sur le terrain. Ainsi, en date du 09 octobre 2013, Martin Koebler, chef de la Mission des Nations Unies en RDC (MONUSCO), a-t-il publiquement accusé le Rwanda, dans une conférence de presse à Goma, de mener une campagne de recrutement et de renforcement militaire de la rébellion du Mouvement du 23 Mars (M23). Ce constat avait été établi, auparavant, par des sources concordantes. Ainsi, d’après un reportage publié par la BBC, en date du 1er août 2013 ;

« Pas loin de quatre-vingt-dix pour cent (90%) des combattants de la rébellion M23 qui se bat à l’est de la République Démocratique du Congo (RDC), sont des militaires de l’armée rwandaise, dont une grande majorité ont été engagés contre leur volonté et celle de leurs familles », avait affirmé à la BBC un rwandais recruté et forcé de rejoindre les rangs des rebelles du M23 qui, par la suite, avait été obligé de fuir le front pour demander l’asile en Ouganda.  

C’est de leur exil en Ouganda qu’ils ont livré leur témoignage à la BBC le mardi 31 juillet 2014. Un autre transfuge qui suivait des études de médecine au Rwanda lors de son recrutement forcé pour le compte du M23, a indiqué à la BBC, qu’il a soigné plus de 300 combattants du M23 blessés au combat, dont la majorité des recrues était rwandaise. Déjà, en date du 20 juin 2013, 16 étudiants rwandais (14 hommes et deux femmes) avaient encore demandé l’asile en Ouganda, en déclarant être victimes du harcèlement des autorités de leur pays pour avoir refusé de se joindre aux rebelles du M23 qui sévissaient à l’Est de la RDC. Deux de ces étudiants en fuite ont affirmé qu’ils avaient refusé de participer au programme parce que leurs amis qui y sont allés n’en sont jamais revenus. La même pratique d’enrôlement forcé pour la guerre en RDC a touché plus particulièrement la Province du Nord du pays. C’est ainsi que des informations concordantes ont rapporté qu’en date du 13 novembre 2013, en district de Rubavu, la police et de hauts officiers de l’armée ont réuni des milliers de jeunes au stade de Gisenyi pour les forcer à s’enrôler, « coûte que coûte » dans les forces armées. 

Comme à son habitude, le Rwanda a continué à nier son soutien au M23 malgré l’accumulation des preuves attestant le contraire. Plus récemment, en 2014, le pouvoir de Kigali n’a pas baissé d’intensité pour préparer la guerre de RDC. C’est ainsi qu’en date du 20 novembre 2014, des sources concordantes avaient fait état d’un communiqué du Ministère de la Défense du Rwanda, daté du 22 octobre, appelant sous les drapeaux des jeunes, entre 18 et 23 ans, de tous les districts du Rwanda. Après la sortie de ce communiqué, les maires ont reçu des instructions pour se dépêcher sur les collines, accompagnés des éléments de la milice DASSO, pour rassembler des jeunes dans ladite tranche d’âge. Comme une rumeur persistante faisait état de l’intention des autorités d’envoyer les nouvelles recrues se faire tuer en RDC, les jeunes ne se sont pas précipités pour se faire enrôler. Signalons que même beaucoup qui avaient été enrôlés ont tenté, bien avant leur départ sur le front, de s’évader. C’est ainsi qu’une brigade de police militaire a été mise aux trousses des déserteurs qui ont été internés dans un camp sur l’île IWAWA où, après avoir subi un endoctrinement couplé d’un reconditionnement guerrier, ils devaient être acheminés sur le front en RDC. 

8.       La torture et les traitements cruels, inhumains et dégradants[7]


Le 10 Octobre HRW a publié un rapport de 102 pages, intitulé « Nous t’obligerons à avouer : Torture et détention militaire illégale au Rwanda ». Il documente la détention illégale dans des camps militaires ainsi que la torture généralisée et systématique aux mains de membres de l’armée. Human Rights Watch a constaté que les juges et les procureurs avaient ignoré les plaintes des personnes anciennement ou actuellement détenues concernant la détention illégale et les mauvais traitements, créant un environnement d’impunité totale.

Entre 2010 et 2016, des dizaines de personnes soupçonnées de collaborer avec des « ennemis » du gouvernement rwandais ont été détenues illégalement et torturées dans des centres de détention militaires par des militaires et des agents des services de renseignement rwandais. Certaines de ces personnes ont été détenues dans des lieux inconnus, parfois au secret, pendant de longues périodes et dans des conditions inhumaines. Le Sous- Comité des Nations Unies pour la prévention de la torture avait suspendu sa visite au Rwanda en raison d'une série d'obstacles imposés par les autorités, notamment l'accès à certains lieux de détention, la confidentialité de certains entretiens et que certaines personnes interrogées pourraient subir des représailles. La délégation a suspendu la visite au cinquième jour de la mission prévue de sept jours qui devait rester au Rwanda du 15 au 21 octobre 2017.

Pour extorquer des aveux sur des accusations imaginaires, pour « formater » des témoins à charge potentiels dans des affaires judiciaires à connotation politique ou, tout simplement, pour faire souffrir des adversaires politiques réels ou supposés, les gardiens du pouvoir du FPR recourent, systématiquement, à la torture et aux traitements cruels, inhumains et dégradants. D’une manière récurrente, des témoignages concordants dénoncent ces pratiques, dans un pays ayant pourtant ratifié les instruments internationaux ad hoc et revu, plusieurs fois ses codes pénal et de procédure pénale. 

Ainsi, en plus de multiples témoignages de victimes de ces pratiques, des voix autorisées ont dénoncé, preuves à l’appui, l’usage systématique de la torture au Rwanda. Les services de renseignements militaires DMI, sont particulièrement pointés du doigt pour leurs recours répétés à la torture afin de faire parler les gens. Dans une interview qu’Erwin van der BORGHT, le représentant d’Amnesty International en Afrique, a accordée à la BBC, il explique comment la culture de la torture s’est normalisée au Rwanda ; il se base sur les enquêtes que son organisation mène depuis ces deux dernières années au Rwanda. S’appuyant également sur les rapports du comité des Nations Unies de lutte contre la torture basée à Genève, il a annoncé qu’entre 2010 et 2012, au moins 18 personnes ont été enlevées et séquestrées dans les prisons clandestines installées souvent dans les camps militaires, où elles ont subi des traitements cruels.  

Selon les révélations des organisations de la société civile et d’anciennes victimes, l’agence de renseignements militaires DMI, réputée pour sa cruauté, a installé plusieurs prisons tenant lieu de laboratoires de la torture, surtout dans les camps militaires de KAMI et MUKAMIRA. Dans ces camps se font toutes sortes de torture : des coups de poing, des coups de pieds, souvent à des personnes enchaînées ou suspendues. L’électrocution est citée comme la méthode préférée des tortionnaires de la DMI. Les anciennes victimes évoquent également d’autres méthodes de torture comme l’étouffement par un sac sur la tête, de longues heures bras et pieds enchaînés de derrière.  

De plus, toutes ces personnes séquestrées qui subissent des tortures sont isolées dans des cellules souvent non éclairées, sans possibilité d’avoir accès aux services d’un avocat ou d’un médecin. Selon de nombreuses personnes qui ont été relâchées, le recours à la torture s’est lourdement intensifié au Rwanda depuis 2010. Plus récemment, en début janvier 2013, la prison de MPANGA a été le théâtre de pires pratiques de torture. Ainsi, les nommés Major NDAGIJIMANA, MUNYAGISAKA, Ezéchiel SEBAHAMBIZI, MAZIMPAKA, SAID, Emile UWIMBABAZI et Diallo Calixte KAGABO ont-ils été transférés de la prison centrale dite 1930 à cette sinistre prison de MPANGA où ils ont été sauvagement torturés. Les mêmes pratiques ont continué sur toute l’année 2013. Ainsi, en septembre 2013, 4 étudiants, à savoir Emmanuel NTAKIRUTIMANA, Jean Baptiste ICYITONDERWA, Samuel HITIMANA et Martin NTAVUKA, soupçonnés d’avoir été instigateurs d’une réclamation de bourse auprès du Premier Ministre, ont été arrêtés, jetés brutalement dans le Commissariat de Police de KICUKIRO pour y être torturés. En plus d’avoir essuyé des coups, ils ont passé plusieurs jours dans d’étroites cellules noires, totalement coupés de toute visite et assistance, et privés de nourriture.  

9.       La détention arbitraire


Tous les leaders de l’opposition ont été condamnés et emprisonné systématiquement sur base de deux articles du Code Pénal :

Article 461 : Infraction contre le Pouvoir établi ou le Président de la République
Toute personne qui:
1° recourt à la force armée ou à toute autre violence en vue de porter atteinte au Pouvoir établi ou de le renverser;
2° porte atteinte à la personne du Chef de l’État dans les mêmes buts visés au point 1º du présent alinéa est passible d’un emprisonnement à perpétuité.

Article 463 : Provocation du soulèvement ou des troubles de la population
Toute personne qui, soit par des discours tenus dans des réunions ou lieux publics, soit par des écrits de toute nature, des images ou emblèmes quelconques, affichés, distribués, achetés ou mis en vente ou exposés aux regards du public, soit en répandant sciemment de faux bruits, excite ou tente d’exciter la population contre le Pouvoir établi, soulève ou tente de soulever les citoyens les uns contre les autres, alarme la population dans l’intention de semer les troubles sur le territoire de la République du Rwanda, est passible d’un emprisonnement de dix (10) ans à quinze (15) ans.

Critiquer les violations de droit de l’homme et le disfonctionnement du système établi par le FPR est purement et simplement passible d’une peine de 10-15 ans de prisons.

Les leaders des FDU-Inkingi résidents au Rwanda ont été arrêtés le 6 Septembre 2017. A l’abris des yeux des représentations diplomatiques, des media et des observateurs de droits de l’homme, dans une salle vide, et en absence des accusés, le 24 Octobre 2017 le juge de la Cour d’appel a prononcé la sentence de maintenir en détention provisoire les 7 membres des FDU-Inkingi. Il s’agit du Premier Vice-Président Boniface Twagirimana avec ses collègues : Fabien Twagirayezu ; Léonille Gasengayire ; Gratien Nsabiyaremye ; Evode Mbarushimana ; Norbert Ufitamahoro ; Théophile Ntirutwa, et Venant Abayisenga.

La saga de la famille Rwigara continue. Arrêtées officiellement le 23 Septembre 2017, la détention de Melle Diane Rwigara et Mme Adeline Rwigara, sa mère a été injustement prolongées sur base des accusations mensongères à géométrie variables.

Le Rwanda a ratifié divers instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme qui préservent la personne humaine contre toute privation de liberté abusive. Il en est ainsi de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme du 10 décembre 1948 (art.3 et 9), le Pacte International Relatif aux Droits Civils et Politiques de 1966 qui garantit le droit à la liberté et à la sécurité de la personne (art.9), la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples de 1981 (article 6) ; la Convention Contre la Torture de 1984 (art.15), etc. En effet, nul ne peut faire l'objet d'une arrestation ou d'une détention arbitraire. Nul ne peut être privé de sa liberté, si ce n'est pour des motifs conformes à la loi.  

La Constitution Rwandaise garantie les droits de la personne. Ainsi nul ne peut faire l'objet de torture, de sévices, ou de traitements cruels, inhumains ou dégradants. Nul ne peut être poursuivi, arrêté, détenu ou condamné que dans le cadre prévu par la loi. 

Après que le Conseil des droits de l'homme des Nations unies ait adopté le dernier résultat de l'Examen périodique universel (EPU) concernant le Rwanda, Amnesty International a exprimé sa satisfaction de ce que le Rwanda avait accepté toutes les recommandations, mais il ajoutait ce qui suit: "Les enlèvements, les disparitions forcées et les détentions au secret, rares au Rwanda ces dernières années, ont augmenté en 2010 alors que les autorités enquêtaient sur une série d'attentats à la grenade. Amnesty International regrette profondément que le Rwanda ait rejeté la recommandation l'exhortant à enquêter sur les affaires de disparitions forcées et d'arrestations et de détention arbitraires". 

Bien que le gouvernement déclare qu'il entend ratifier la convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, il se montre toujours réticent à enquêter sur de telles affaires. Il est à constater qu'il souffle toujours le chaud et le froid. D'où l'ineffectivité des procédures légales en matière de privation de liberté.  Il a élaboré un « mur de lois » liberticides, comme l’a proclamé le général Kagame lui-même, infranchissable par les opposants.

10.  L'ineffectivité des procédures légales de privation de liberté

La privation de liberté est, en Droit Pénal Rwandais, encadrée par des procédures impératives dont l’irrespect expose son auteur à des poursuites pénales (articles 88 et 89 du Code de Procédure Pénale). Passé les étapes de l’arrestation (un Procès-Verbal d’Arrestation d’une durée maximum de 72 heures) et l’arrêt provisoire (un Mandat d’Arrêt Provisoire d’une durée de 7 jours non renouvelable), nul ne devrait être détenu préventivement plus d’un mois (Ordonnance de Mise en Détention Provisoire d’une durée de 30 jours).  

 Or, la prorogation de l’arrêt provisoire, dans les cachots et les brigades, tout comme la détention préventive dans les maisons d’arrêt (allant jusqu’à 6 mois pour un délit et jusqu’à 12 mois pour un crime) est, en système rwandais de procédure pénale, la règle et non l’exception. Si, en vertu de la loi, nul ne devrait être détenu préventivement au Rwanda plus de 54 semaines, des milliers de détenus ont passé des années en prison avant d’avoir été jugés. La situation est invariable dans les différentes maisons d’arrêt du Rwanda. L’allongement démesuré de la détention préventive est devenu une pratique tellement banalisée que les détenus, qui croupissent dans les maisons d’arrêt du Rwanda, considèrent la comparution devant un juge comme un soulagement. 

Qui plus est, de nombreux prisonniers sont détenus dans des camps militaires où les garanties qui protègent les personnes détenues dans des postes de police, entre autres centres de détention officiels, sont contournées. Les personnes qui sont détenues illégalement à l'abri des regards sont également sujettes à la torture ainsi qu’aux traitements cruels, inhumains et dégradants. Ainsi, des individus ont été arrêtés, souvent de manière arbitraire, par l'armée agissant parfois en collaboration avec la police, dans le cadre des enquêtes menées par les autorités rwandaises sur des questions de sécurité. Les personnes concernées étaient presque toutes des hommes âgés de 20 à 45 ans. Après leur arrestation, des hommes ont été maintenus au secret et interrogés par des agents du service de renseignements militaires.  

Les familles et les proches étaient dans l'impossibilité d'obtenir confirmation du lieu de détention de leurs proches et de savoir s'ils étaient encore en vie. Parfois, ceux-ci avaient effectivement disparu. Les autorités niaient systématiquement la détention des personnes concernées ou ne répondaient pas aux demandes d'information des familles et des avocats. Pendant leur détention aux mains de l'armée qui se prolongeait souvent plusieurs mois, les détenus étaient privés de contact avec leurs familles et leurs avocats ainsi que de soins médicaux.  

Le fait pour les familles des disparus d'ignorer le lieu de détention de leurs proches avait des conséquences psychologiques très importantes. Les disparus étant presque uniquement des hommes et les rafles visant le plus souvent des personnes appartenant à la même communauté, les proches des détenus de sexe masculin vivaient dans la peur constante d'être arrêtés à leur tour. Quant aux femmes – épouses, mères et sœurs – elles devaient tenter de retrouver leurs proches, obligées parfois de recourir à la corruption.  

Qui est investi du pouvoir d’arrestation ?

Depuis le début de 2010, le rôle de l'armée et de la police dans l'arrestation d'individus soupçonnés de menacer la sécurité nationale est de plus en plus flou. C’est par suite à ce flou qu’à partir du milieu de l’année 2010, se sont multipliés les disparitions forcées, les actes de torture et d'autres formes de mauvais traitements perpétrés contre des personnes se trouvant dans des centres de détention militaires. Ces opérations conjointes ont fortement limité la surveillance et semé la confusion dans les liens hiérarchiques. De ce fait, les responsables de violations des droits humains risquent moins d'avoir à rendre compte de leurs actes un jour. Le Service des renseignements militaires, J2, gère un système parallèle d'arrestation et de détention. Ce système à l'intérieur d'un système est en grande partie réservé aux personnes soupçonnées de menacer la sécurité nationale. Or, la plupart de ces suspects ne le sont que pour des raisons politiques. 

On assiste à des périples à l'intérieur du système de détention, impliquant des transferts de prisonniers d'un endroit à l'autre. Du coup, il est plus difficile de connaître leur lieu de détention et ils sont plus susceptibles d'être torturés et maltraités. D’anciens prisonniers ont affirmé qu'ils avaient les yeux bandés lors des transferts d'un lieu de détention à l'autre, transferts qui se déroulaient le plus souvent la nuit. Un homme a décrit dans les termes suivants son transfert du ministère de la Défense vers un endroit inconnu dont il a appris par la suite qu'il s'agissait de Camp KAMI : « Ils m'ont fait monter à bord d'un véhicule. Au bout d'une heure environ ils se sont arrêtés et ont ôté le bandeau qui me recouvrait les yeux. Ils ont pris tous mes vêtements et m'ont donné un uniforme militaire. »  

Cet ensemble d'irrégularités fait qu’il y a aujourd'hui 7099 détenus qui n'ont aucun dossier pénal, ou dont le dossier est vide ou fantaisiste. Les dirigeants du Rwanda ont eux-mêmes admis cette situation, aux ondes de la Voix de l'Amérique.  La direction nationale des services pénitentiaires a déclaré, en date du 30 juillet 2014, que plus de 30.000 détenus qui avaient été condamnés aux travaux d'intérêt général (TIG) sont portés disparus ; il est légitime de se demander comment et par quels moyens un effectif aussi important de gens peut disparaître sans que les autorités le sachent. En date du 02 juin 2014, les autorités nationales ont déclaré que dans la région de NGORORERO, plus de 16.000 personnes ont disparu. Rappelons qu'en 2014, plusieurs dizaines de corps ont été trouvés flottant dans le lac RWERU, ce qui a donné lieu à une polémique entre les autorités du Rwanda et celles du Burundi. Jusqu'à ce jour, la tragédie de ces personnes n'a pas encore été élucidée.

11.  Le non-respect des garanties du procès équitable


Les principes cardinaux universels pour asseoir un jugement équitable reposent sur : 
-                      le droit à avoir un juge indépendant et impartial, 
-                      le principe du contradictoire, 
-                      le respect des droits de la défense et,  
-                      l'égalité des armes. 

Le principe d'égalité des armes "implique l'obligation d'offrir à chaque partie une possibilité raisonnable de présenter sa cause... dans les conditions qui ne la placent pas dans une situation du net désavantage par rapport à son adversaire” (Mme Dominique KARSENTY, conseiller référendaire à la Cour de cassation) ; 

La Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales s'oppose à l'ingérence du pouvoir législatif dans l'administration de la justice afin d'influer sur le dénouement judiciaire des litiges.  

Lors de l'EPU de 2011, le Rwanda a accepté les recommandations de "poursuivre les réformes de son système judiciaire" notamment pour éliminer la corruption et les ingérences politiques et améliorer la protection des témoins. 

Human Rights Watch constate dans son rapport mondial de 2014, qu'en dépit des réformes juridiques et d'améliorations administratives, la justice rwandaise manque toujours d'indépendance, ce qui conduit à des procès inéquitables dans un certain nombre d'affaires politiquement sensibles. 

11.1.     Le cas de Madame Victoire Ingabire Umuhoza


Le cas de Madame Victoire INGABIRE UMUHOZA reste un cas d'école, et toujours d'actualité. Le rapport intitulé Rwanda. La justice mise à mal : le procès en première instance de Victoire Ingabire   nous explique comment Madame INGABIRE a été privée d'un procès équitable:  

« Le procès en première instance de Victoire Ingabire a été entaché d’irrégularités, et les normes internationales ont été bafouées », a déclaré Sarah Jackson, directrice adjointe par intérim du programme Afrique d’Amnesty International. Victoire Ingabire, présidente des Forces démocratiques unifiées-Inkingi (FDU-Inkingi), a été déclarée coupable de conspiration contre les autorités par le terrorisme et de minimisation du génocide de 1994, puis condamnée à huit ans d’emprisonnement le 30 octobre 2012. Depuis le début de l’enquête, Paul Kagame, le président rwandais, a fait des déclarations dans les médias et sur Twitter sur la culpabilité présumée de Victoire Ingabire, qui étaient contraires au droit de celle-ci à la présomption d’innocence. Les accusations de terrorisme s’appuyaient en grande partie sur des aveux obtenus à la suite d’une période de détention sous la responsabilité de l’armée, au camp Kami, où la torture serait employée. Le tribunal n’a pas suffisamment enquêté cet aspect du procès. « Amnesty International a recueilli des informations selon lesquelles des détenus ont été soumis à la torture et à d’autres formes de mauvais traitements au camp Kami. Le fait qu’au moins deux hommes jugés en même temps que Victoire Ingabire y ait été incarcérés pendant des mois avant de l’incriminer nous inspire de graves inquiétudes et doit donner lieu à une enquête. » 
Amnesty International a observé le procès dans sa quasi-totalité, de septembre 2011 à avril 2012, et a constaté que Victoire Ingabire a été traitée de manière injuste à de nombreuses reprises. Les juges paraissaient chercher la confrontation avec la défense, et l’accusée était régulièrement interrompue ou réprimandée par les magistrats. Les éléments de preuve étaient traités différemment selon qu’ils étaient produits par la défense ou le parquet : ceux qui étaient présentés par la défense étaient remis en cause de façon répétée, tandis que des questions fondamentales en rapport avec les informations fournies par le parquet n'étaient pas posées. D’autres faits reprochés à Victoire Ingabire au début du procès, ceux concernant ses propos, se fondaient sur des lois vagues et imprécises sanctionnant l’« idéologie du génocide » et la « discrimination et le sectarisme », et la défense aurait eu des difficultés à déterminer en quoi son comportement constituait une infraction. Ces lois ont été adoptées afin de faire barrage aux discours incitant à la haine au cours des années qui ont suivi le génocide de 1994. La formulation vague de ces textes a cependant été utilisée à mauvais escient afin d’ériger en infraction la liberté d’opinion et l’opposition. 

« Après avoir examiné les éléments de preuve produits lors du procès, Amnesty International ne voit pas ce qui prête à penser que Victoire Ingabire avait l'intention d’inciter à la violence ou à la haine à l'égard d'une ethnie, a ajouté Sarah Jackson.  

« Le gouvernement s’est engagé à réviser la loi sur l'“idéologie du génocide” afin de la mettre en conformité avec les obligations du Rwanda aux termes du droit international, a-t-elle poursuivi. Tenir cette promesse serait une initiative bienvenue. »
 
Les autorités judiciaires doivent désormais garantir que Victoire Ingabire bénéficie d’une procédure d’appel qui respecte les normes internationales en matière d'équité des procès. « Des opposants aux autorités rwandaises ont fait l’objet de manœuvres de harcèlement et d'intimidation, ou ont été placés en détention. Une procédure d'appel équitable montrerait que les procès politiques sont traités de manière indépendante », a conclu Sarah Jackson. Intitulé Rwanda. La justice mise à mal : le procès en première instance de Victoire Ingabire, ce rapport porte sur l’équité de la procédure et sur la capacité du tribunal à juger l’affaire dans le respect des normes internationales. L’organisation ne prend pas position sur la culpabilité éventuelle de Victoire Ingabire. Victoire Ingabire, présidente des Forces démocratiques unifiées-Inkingi (FDU-Inkingi), est arrivée au Rwanda en janvier 2010 pour participer à l'élection présidentielle de 2010. Elle a été déférée à la justice aux côtés de Vital Uwumuremyi, Tharcisse Nditurende, Noel Habiyaremye et Jean-Marie Vianney Karuta, tous anciens membres des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), un groupe armé actif dans l’est de la République démocratique du Congo. Le parquet a affirmé qu’elle avait conspiré avec ces hommes dans le but de former un groupe armé, la Coalition des forces démocratiques (CDF), dont la mission consistait à déstabiliser le Rwanda. Les quatre coaccusés ont tous plaidé coupables, fait des aveux et sollicité la clémence du tribunal." 

Ce texte d'Amnesty International a été rédigé lorsque l'appel interjeté par Madame INGABIRE restait pendant devant la Cour Suprême.  

Devant cette juridiction, la Requérante a rappelé la violation de ses droits ( Droit à un tribunal indépendant et impartial, droit à l’égalité des armes et au principe du contradictoire,  l’obligation incombant à la juridiction du jugement d’instruire à charge et  à décharge , le  principe de la légalité des délits et des peines, le droit à une décision judiciaire motivée en fait et en droit , droit à la liberté d’expression, de pensée, d’opinion, etc…) lesquels constituent la substance même du droit à un procès équitable. 

Malgré ces violations, la Cour Suprême a rendu le 13 décembre 2013 un arrêt déclarant Madame Victoire INGABIRE UMUHOZA coupable des infractions de complot en vue de porter atteinte au pouvoir établi en recourant à la force et à toute violence, de minimisation du Génocide et de la diffusion des rumeurs susceptibles d’exciter la population contre les pouvoirs établis et de soulever les citoyens les uns contre les autres… 
 
Dès lors, sa peine a été alourdie, passant de 8 à 15 ans de prison ferme pour des motifs purement politiques car en réalité, en se portant candidate à l'élection présidentielle de 2010 contre le général Paul KAGAME, elle ne faisait qu'exercer ses droits constitutionnels. 
Vu les diverses irrégularités qui ont caractérisé son procès et les violations des droits de l'homme dont elle a été l'objet, Madame Victoire INGABIRE UMUHOZA a introduit en septembre 2014 une requête introductive d'instance devant la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples qui a son siège à Arusha en Tanzanie. 

Dans son arrêt du 24 Novembre 2017 la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples a confirmé que les droits d’expression, les droits politiques et les droits de défense avaient étaient violées. D’autre part la Cour a reconnu que la justification des peines lui infligées sur base des articles 461 et 463 du Code Pénal Rwandais, et sur base de la négation du génocide, référence faite au discours fait sur le mémorial de Gisozi, était sans fondement et fait partie constituante des violations des droits ci-haut évoqués.

Ce manque d'indépendance de la justice rwandaise dans les affaires politiquement sensibles devient caractéristique dans la plupart de dossiers. Relevons encore, à titre indicatif mais non exhaustif, les cas de Déogratias MUSHAYIDI et du Dr Christophe MPOZAYO.

11.2.     Le cas de Mr. Déogratias Mushayidi


Après son kidnapping et son extradition au Rwanda le 05 mars 2010, Monsieur Déogratias MUSHAYIDI, Président du PDP-Imanzi a été détenu dans un endroit inconnu pendant plus d'une semaine.

Suite aux multiples interventions des organisations comme Amnesty international, le gouvernement rwandais a enfin reconnu qu'il le détenait.

Après un simulacre de procès sans témoins à charge ni à décharge, le président de PDP IMANZI a été condamné à la prison à vie pour des motifs purement politiques.

Aujourd'hui, il purge sa peine dans des conditions inhumaines à la prison de Mpanga. Il n’est pas autorisé à rencontrer d'autres détenus parce que, selon les autorités carcérales, il pourrait les inciter à la désobéissance civile.  Il reste en isolement toute la semaine et ne sort que pour assister à la messe dominicale ou lors des visites par les membres du parti.

11.3.     Le cas du Dr. Christophe Mpozayo


Dr Christophe MPOZAYO, Administrateur des Bases de données pour EAST AFRICA ASSEMBLY, a été arrêté le 07 novembre 2013 à l’aube alors qu'il s'apprêtait à prendre l'avion pour regagner son service à Arusha. La raison de son arrestation est d’avoir échangé des messages sur SKYPE avec Jean-Damascène MUNYAMPETA, Secrétaire Général du parti politique de l'opposition "PDP-Imanzi". Le Parquet prétend que lors de ces échanges, Dr MPOZAYO aurait critiqué la manière dont le parti politique du FPR au pouvoir assure la gestion du pays.  Il est poursuivi en vertu de l’article 463 du code pénal Rwandais sur la propagation des rumeurs ou les informations susceptibles de créer les soulèvements ou la désobéissance dans la population. Or, pour que cela soit pénalement condamnable, il faut que ces propos aient été tenus en public.

Lors du procès, le ministère public n'a pas pu prouver que Dr MPOZAYO a publiquement tenu ces propos. Dès lors, il ne pouvait pas être accusé de violation de l'article 463. Il a alors été acquitté le 31 mars 2014.

Quarante minutes après l’acquittement, pendant qu'il se préparait à rejoindre sa famille restée à Nairobi, il a été de nouveau arrêté pour les mêmes chefs d'accusation sous prétexte que le procureur venait d’acquérir de nouveaux éléments, à savoir deux témoins qui se seraient présentés, affirmant avoir participé aux échanges sur Skype entre Monsieur MUNYAMPETA et Dr MPOZAYO et que de ce fait, leurs propos sont qualifiés de publics.

Lors du nouveau procès en avril 2015, le procureur n'a pas pu présenter les témoins en question et malgré leur absence, Dr MPOZAYO a été condamné à 7 ans d’emprisonnement pour les accusations dont il avait été innocenté. Il a interjeté appel mais il reste en détention dans la prison de MIYOVE.

12.  L'instrumentalisation du monde carcéral   

  

L’écrasement et le chantage psychologique dans le milieu carcéral rwandais est tel que les détenus des prisons rwandaises ont été, à maintes reprises, utilisés à différentes fins. Parmi les nombreuses facettes de l’instrumentalisation du milieu carcéral rwandais, il y a lieu de se limiter aux plus emblématiques : l’utilisation des détenus comme témoins à charge dans plusieurs procès devant le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) et, plus récemment, l’implication des prisons rwandaises dans la campagne pour la modification de l’article 101 de la Constitution en vue de permettre au Président KAGAME de briguer un 3ème mandat. 
 
De plus en plus de prisonniers rwandais ont été amenés au TPIR pour témoigner dans les procès de génocide. Ces témoins, dont la plupart ont avoué devant la justice rwandaise avoir participé au génocide, ont été incarcérés temporairement au centre de détention des Nations unies pour la durée de leur séjour à Arusha. C’est ainsi que s'est perpétuée, jusqu‘à ce que le TPIR ferme ses portes, la pratique consistant à entretenir au sein des prisons rwandaises des « blocs Arusha » dont les pensionnaires étaient sélectionnés, entretenus et méticuleusement formés dans l’optique d'aller témoigner à charge devant le TPIR contre les anciens dignitaires du régime Habyarimana. Il y avait, ainsi, un traitement de faveur au profit de ces détenus devant comparaître comme témoins à charge auprès du TPIR à Arusha. Ce statut privilégié de « prisonnier témoin au TPIR » était très convoité, ce qui a amené des détenus, en instance de jugement ou déjà condamnés, de se prévaloir à tort d’une bonne connaissance des faits incriminés devant le TPIR. Mais le but poursuivi était double : en vertu de la loi de 1996 portant répression du génocide, tout détenu dans les prisons rwandaises qui s’engage à collaborer avec l’accusation se voit bénéficier du pardon pénal. C’est ainsi que de nombreux détenus dans les prisons rwandaises ont été utilisés par le gouvernement rwandais pour obtenir des condamnations inespérées d’anciens cadres hutus du régime précédent considérés, avant tout, comme des ennemis politiques par le pouvoir du FPR.  

La campagne qui a débouché à la modification de l’article 101 de la Constitution rwandaise pour permettre au Président Paul KAGAME de briguer un 3ème mandat n’a pas oublié le milieu carcéral. En effet, en dépit de la peine accessoire de dégradation civique qui, normalement, empêche les condamnés à jouir des droits civiques et politiques, des groupes importants de prisonniers se sont constitués pour signer des pétitions en faveur de la modification de la Constitution, un acte éminemment politique. Ainsi, 2870 détenus de la prison de RUSIZI et 1724 détenus de la prison de RUBAVU, pour ne citer que ces deux cas, ont signé des pétitions qui leur avaient été minutieusement préparées et soumises. Des sources concordantes ont fait état de pressions et de chantage exercés pour que des prisonniers acceptent de mentionner leur identité et signer les pétitions.

11.1. Des conditions de détention inhumaines   


Malgré que l’effectif des détenus dans les prisons rwandaises ait diminué de façon significative ces dernières années passant à environ 50 mille sur l’ensemble des maisons d’arrêt de l’Etat, les problèmes logistiques demeurent une préoccupation constante. Dans un rapport rendu public en décembre 2014, le Haut-Commissaire de l’Administration pénitentiaire, le Général RWARAKABIJE, a rappelé ce problème, citant entre autres les prisons de NYANZA et de HUYE, dans la Province du Sud, qui abritent 130% de leur capacité. Cette promiscuité génère beaucoup de conséquences sur le quotidien et le sort des prisonniers du Rwanda. La forte promiscuité génère ou aggrave les maladies contagieuses et non contagieuses.  

En effet, il est impossible de tenir les lieux dans un minimum d’hygiène et de propreté.  L’humidité, l’insalubrité, les intempéries, le manque d’eau et la défaillance des sanitaires, etc., tous ces problèmes dénoncés régulièrement par les familles et les acteurs non étatiques intervenant en milieu carcéral, ne semblent pas être la priorité pour le gouvernement. Du coup, le taux de mortalité reste élevé dans le milieu carcéral rwandais. Certaines prisons demeurent réputées pour la morbidité et le risque de mourir pour les détenus. Ceux des prisonniers vivant avec des maladies graves n’ont absolument aucune chance de s’en sortir.  

Dans certaines prisons existent un compartiment pour les détenus condamnés à la perpétuité avec isolement. L’emprisonnement dans l’isolement est un traitement inhumain et dégradant qui touche quelques deux milles prisonniers au Rwanda. Or, de l’avis du Haut-Commissaire aux prisons, les prisons rwandaises n’ont pas les moyens pour assurer un minimum vital aux condamnés en isolement. Si ladite mesure reste non exécutée dans la plupart de cas, le mélange de condamnés à l’emprisonnement à perpétuité et ceux de courte durée est une circonstance qui ne laisse à ces derniers les chances d’amendement et de réhabilitation. La violence de la part des personnels pénitentiaires mais aussi entre détenus demeure une réalité effective bien que ne transparaissant pas dans les rapports officiels et statistiques.

Ci-après un exemple de la réalité de ce qui se passe à la prison de Muhanga. Une délégation des pays de l’Union européenne représentés à Kigali a rendu visite à la prison de Muhanga et s’est vue refuser l’accès à l’intérieur de cette prison.



Life prisoners – all Hutu – in Muhanga (formerly Gitarama) Prison are, according to the Global Research caption, regularly “hung, cuffed and crucified.” (La vie des prisonniers, tous hutu, dans la prison de Muhanga (anciennement appelée prison de Gitarama) sont régulièrement pendus, menottés et crucifiés, selon l’enquête menée par Global Research).


13.  Les restrictions aux libertés d'expression et d'association


Malgré l'acceptation des recommandations émises lors de son EPU de 2011, la liberté d'expression au Rwanda ne s'est guère améliorée. Bien au contraire. En matière de respect de la liberté d'expression, le Rwanda est passé du 161ème rang en 2012 à 162ème en 2015 sur 180 pays. En effet, le gouvernement rwandais a accentué la censure et la répression des médias en violation de ses engagements. 

13.1.     La censure et la répression des médias  


 Dans son rapport au Conseil des droits de l'homme de l'ONU de juin 2014, Monsieur Maina KIAI, rapporteur spécial de l'ONU sur la liberté d'association et de réunion, a fait état, entre autres, de la "prévalence de l'opposition à tout débat vigoureux et à la libre expression d'opinions au Rwanda, de l'hostilité du gouvernement à l'égard d'initiatives pacifiques prises par ses détracteurs et de l'existence d'un cadre juridique qui permet de réduire au silence les voix dissidentes".  

Bien que le gouvernement rwandais ait rejeté plusieurs des constatations faites par le rapporteur spécial, de nombreux faits témoignent de la détérioration progressive et programmée de la liberté d'expression.  

Ainsi, le gouvernement s'est distingué par des intimidations visant tout journaliste, y compris étranger, osant questionner la politique rwandaise. Ce fut le cas, par exemple, de Steve Terrill, journaliste freelance américain, qui s’est vu refuser, le samedi 15 mars 2014, l’accès au territoire rwandais alors qu’il se rendait à Kigali couvrir pour Al Jazeera et The Christian Science Monitor les commémorations des 20 ans du génocide de 1994. Arrivé à Kigali, il a été empêché d’entrer dans le pays puis retenu plusieurs heures sans pouvoir téléphoner, avant d’être mis dans un avion à destination d’Addis Abeba. 

13.2.     Le harcèlement des journalistes

Le harcèlement des acteurs de l’information s’étend aussi à ceux qui résident dans les pays voisins. Ainsi, plusieurs journalistes ougandais qui ont traité de sujets en lien avec le Rwanda ont récemment été visés par d’inquiétantes menaces de la part des autorités rwandaises agissant notamment par le biais de leurs services des renseignements et de sécurité à l’étranger. 

Par exemple, depuis une conférence de presse, le 18 juin 2013, Tom Malaba, journaliste expérimenté travaillant actuellement pour une agence d’informations en ligne, l’Ugandan Radio Network, dit être continuellement suivi et affirme que son domicile a été attaqué une fois pendant la nuit.  

 Le 14 février 2014, Ivan Okuda, journaliste freelance pour le Daily Monitor, a été contraint par sa direction à présenter des excuses publiques. 

 Le 16 février 2014, Andrew Muhanguzi, le frère d’un journaliste rwandais exilé, rédacteur du site d’information Umuvugizi qui vit aujourd’hui en Suède, a été porté disparu. Il a été arrêté à Kampala par des hommes se présentant comme des policiers ougandais.  

14.  La chasse à l'homme continue au Rwanda


Ainsi à titre indicatif mais non exhaustif, Édouard Mutsinzi, ex-rédacteur en chef du journal Le Messager s'est retrouvé en exil en Belgique après avoir échappé à une tentative d'assassinat qui l'a rendu invalide — il a été atteint grièvement au dos et a perdu l'usage de la parole. Un autre journaliste, cette fois-ci, de la télévision rwandaise, Emmanuel Munyempanzi, a été tué par balle. (…) Jean-Pierre Mugabe, ancien rédacteur en chef du journal Le Tribun du Peuple, (…) exilé aux États-Unis, le régime de Kigali n'a pas hésité à lui envoyer des tueurs à gages, pour le supprimer. Appolos Hakizimana, rédacteur en chef du bimensuel Umuravumba, a été abattu de deux balles dans la tête. M. Jean-Marie Hategekimana, journaliste de l'hebdomadaire gouvernemental Imvaho, assassiné.  Deux journalistes de l'hebdomadaire Umuseso, Mugisha Furaha et Kadafi Rwango, ont été blessés dans une tentative d'assassinat. Jean Bosco Gasasira, directeur de publication du journal Umuvugizi, victime d'une tentative d'assassinat à la Edouard Mutsinzi. En juin 2010, Jean-Léonard Rugambage, rédacteur en chef du journal Umuvugizi, a été tué par balles devant son domicile à Kigali. Tharcisse Semana, un autre journaliste rwandais s'est exilé en Suisse après avoir échappé miraculeusement aux sbires du Directorate of Military Intelligence (DMI). 

 De même, le journaliste et directeur de la radio confessionnelle Amazing Grace, Cassien Ntamuhanga, a été condamné, vendredi 27 février 2015, à une peine de 25 ans de prison par le tribunal de Kigali, au terme d’un procès initié en novembre 2014. Alors qu’il plaidait non coupable, le journaliste a été reconnu coupable de toutes les charges pesant contre lui : « formation d’un groupe criminel », « conspiration contre le gouvernement ou le président de la République », « complicité de terrorisme », et « entente en vue de commettre un assassinat ».  

Le 25 octobre 2014, une commission ad hoc créée par la RURA, le régulateur gouvernemental sous l'autorité du premier ministre, a suspendu les émissions au Rwanda du service kinyarwanda de la British Broadcasting Corporation (BBC). Ce médium avait osé diffuser un   documentaire télévisé intitulé “ Rwanda's Untold Story" (L'histoire méconnue du Rwanda).  
 
Quelques jours après, la Commission rwandaise des médias, un organe indépendant d'autorégulation des médias, a fait l'objet d'une campagne de déstabilisation féroce s'en prenant autant au mandat légal de la BBC qu'à son président. La Commission avait mis en cause la décision de suspension des émissions de la BBC au Rwanda. La campagne fut menée aussi par des proches du pouvoir tel que Arthur Asiimwe, directeur de la Rwanda Broadcasting Agency, la télévision publique.  

En réalité, la décision du gouvernement de suspendre les émissions de la BBC ne faisait que "confirmer la grave et constante détérioration de la liberté de l’information au Rwanda, déclare Cléa Kahn-Sriber, responsable du bureau Afrique de RSF. Alors que les médias indépendants ont été réduits comme peau de chagrin, il semblerait que le gouvernement rwandais s’attaque maintenant aux médias internationaux, en se dotant d’outils spécifiques pour légaliser la censure."  

Cette politique n'a pas cessé. Preuve en est la remise à l'ordre du jour en février 2015 de l'arrêté du Premier ministre sur la régulation des médias. Il s’agit de transférer de nombreuses responsabilités de régulation de la RMC, un organe indépendant, vers le régulateur gouvernemental, la RURA.  

15.  Le musellement de la Société civile  


Le Rwanda a accepté toutes les recommandations du dernier EPU visant à assurer la protection des défenseurs des droits humains. Toutefois, les organisations indépendantes de la société civile demeurent extrêmement faibles, en conséquence d'actes d’intimidation et d’infiltration de la part de l’État pendant des nombreuses années. En juillet 2013, des membres soupçonnés d’être favorables au gouvernement ont pris le contrôle de la direction de la dernière organisation rwandaise de défense des droits humains encore efficace, la Ligue rwandaise pour la promotion et la défense des droits de l'homme (LIPRODHOR), par une manœuvre effectuée en violation des statuts de l'organisation et de la loi rwandaise. L’Office rwandais de la gouvernance, organisme qui supervise les organisations non gouvernementales (ONG) rwandaises, a reconnu la nouvelle hiérarchie de la LIPRODHOR quelques jours plus tard. La direction évincée de la LIPRODHOR a porté plainte devant la justice mais le tribunal de grande instance de Nyarugenge à Nyamirambo (Kigali) a statué en août 2014, en se fondant sur des arguments de procédure, que cette plainte n'était pas recevable. Les dirigeants destitués de la LIPRODHOR ont interjeté appel. Le 23 mars 2015, le juge de la Haute Cour à Kigali a rejeté l'appel interjeté par les membres du conseil d'administration "légitime" de LIPRODHOR. Monsieur LAHIDJI Karim, président de la FIDH, a déclaré le 3 avril 2015, suite à l'arrêt de cette cour, que la FIDH estime qu'il n'y a plus d'ONG indépendante des ligues des droits de l'Homme au Rwanda. En effet, le nouveau comité élu a voué son allégeance au régime du FPR au pouvoir et ne peut donc pas dénoncer les violations des droits de l'homme commises par ce régime.

Le 18 juillet 2013, un militant anti-corruption, Gustave Makonene, coordinateur du Centre de plaidoyer et de consultation juridique de Transparency International Rwanda à Rubavu, a été retrouvé mort à Rubavu. En septembre 2014, deux policiers ont été arrêtés dans le cadre de l'enquête sur ce meurtre. Après avoir tout d'abord nié être impliqués dans ce meurtre, les deux suspects ont plaidé coupable et ont été condamnés à 20 ans de prison en janvier 2015. La reprise des enquêtes sur cette affaire et le fait que le processus judiciaire a été mené à son terme ont constitué des éléments encourageants. La reprise des enquêtes n’a pas été un effet du hasard ou une bonne foi de la part du gouvernement rwandais, elle est plutôt due à une pression de la communauté internationale suite à une alerte de Transparency international.

Le Rwanda s'est engagé à suivre la recommandation de remplacer l'exigence d'un enregistrement annuel des ONG par une accréditation de cinq ans renouvelable et de réduire les lourdeurs des procédures d'accréditation en général. Toutefois, ces procédures demeurent très pesantes. Les ONG ne peuvent obtenir une accréditation de cinq ans que si elles fournissent la preuve de leur financement pendant toute cette période quinquennale – exigence que la plupart des ONG ne sont pas en mesure de remplir.  

16.  Les violations de la vie privée


 "La protection de la vie privée constitue un droit qui ouvre sur d'autres, et affecte notre capacité à exercer presque tous nos autres droits, et notamment la liberté d'expression et d'association avec ceux que nous choisissons, et notre droit de faire des choix politiques, de pratiquer nos croyances religieuses et de construire notre vie de famille". 

Contrairement à ce principe, la sécurité, la dignité et les valeurs fondamentales du peuple rwandais ne reposent que sur le bon vouloir du FPR au pouvoir. Le droit à la vie privée n'existe pas au Rwanda. Tout le monde surveille tout le monde. Les militaires se surveillent entre eux, les politiques se surveillent entre eux, les agents de l'état se surveillent entre eux, les paysans se surveillent entre eux, le mari surveille sa femme et vice-versa, les enfants surveillent leurs parents et les parents, leurs enfants.
 
Comme si cela ne suffisait pas, la mise en place d'un système de renseignement est tellement développée au Rwanda que l'ère numérique dans laquelle nous vivons impacte énormément sur l'exposition non souhaitée de notre sécurité émotionnelle, psychologique et même physique. Tous les aspects de la vie sociale quotidienne se trouvent exposés en ligne

Le gouvernement rwandais a acquis une capacité énorme d'amasser et de rechercher des documents numériques, des écoutes téléphoniques, des médias sociaux, si bien qu'il a le pouvoir de connaître chaque rwandais dans la moindre de ses méandres. 

L'Etat rwandais a le pouvoir de nous connaître dans le moindre détail. 

Le gouvernement de Kigali profite de cette situation pour éliminer physiquement tous ceux qui sont soupçonnés de constituer un danger potentiel contre le régime. Il n'y va pas par quatre chemins, car la solution est de kidnapper la personne civile ou militaire, de n'importe quel coin du monde, pour l'amener dans les sous-sols de son abattoir militaire de KAMI. Ce système a été largement exposé ci-dessus. 

17.  La répression de l'opposition politique  


Le régime du FPR au pouvoir fait toutes sortes de tentatives pour intimider, saboter et éliminer l'opposition politique qui s'organise et fournit toutes sortes d'efforts et de martyr pour défendre la population meurtrie par les abus et exactions de ce régime, en vue de mettre en place une véritable démocratie, basée sur le pouvoir du peuple, par le peuple et pour le peuple.  

Le Code Pénal Rwandais permet de renouveler la détention provisoire 9 fois. ; ceci revient à dire que qu’une personne peut être détenu arbitrairement 9 mois en se basant abusivement sur les articles 461 et 463 fustigés par la CADH :

Article 461 : Infraction contre le Pouvoir établi ou le Président de la République
Toute personne qui :
1° recourt à la force armée ou à toute autre violence en vue de porter atteinte au Pouvoir établi ou de le renverser ;
2° porte atteinte à la personne du Chef de l’Etat dans les mêmes buts visés au point 1º du présent alinéa est passible d’un emprisonnement à perpétuité.

Article 463 : Provocation du soulèvement ou des troubles de la population
Toute personne qui, soit par des discours tenus dans des réunions ou lieux publics, soit par des écrits de toute nature, des images ou emblèmes quelconques, affichés, distribués, achetés ou mis en vente ou exposés aux regards du public, soit en répandant sciemment de faux bruits, excite ou tente d’exciter la population contre le Pouvoir établi, soulève ou tente de soulever les citoyens les uns contre les autres, alarme la population dans l’intention de semer les troubles sur le territoire de la République du Rwanda, est passible d’un emprisonnement de dix (10) ans à quinze (15) ans.

17.1.     FDU INKINGI 

 

Depuis le 6 Septembre, le leadership des FDU-Inkingi au Rwanda est complétement décapité. C’est désormais devenu une tradition FPRiènne que les opposants, qui ont été arbitrairement emprisonnés et comparus devant les tribunaux rwandais complètement inféodés à la dictature du FPR, soient accusés de constituer des groupes armés pour renverser la dictature du FPR. Le FPR trouve des délateurs qu’il arrête avec ceux qu’il veut inculper, et qui serviront comme témoins à charge. Celui qui excelle dans la pièce théâtrale et respecte les consignes est libéré et même récompensé.

Mademoiselle Diane Rwigara a été également accusée entre autres de crime semblable “d’intelligence avec une organisation terroriste” pour avoir tenté se présenter aux élections présidentielles comme candidate indépendante.

17.1.1.                     La présidente du parti 


Alors que le procès de Madame Victoire INGABIRE UMUHOZA, présidente des FDU INKINGI, parti d'opposition au régime du FPR au pouvoir, est en cours devant la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples, le gouvernement rwandais lui fait subir dans sa détention, des traitements inhumains et dégradants. 

En effet, en date du 10 juillet 2015, des restrictions spéciales lui ont été imposées. Elle a été notamment privée de la visite de son avocat ; les livres de lecture et de prières lui ont été retirés ; il lui a été interdit de porter ses chaussures habituelles et n’a été autorisée qu'à mettre ses sandales ; la fenêtre de sa cellule a été fumée sur toute sa surface de manière que la lumière ne puisse pénétrer dans sa cellule. Les jours qui ont suivi, sa nourriture a été soumise à la fouille, chamboulée avec des fourchettes ramassées de la boue, à la recherche, soi-disant, de la drogue. 

Le 18 août 2015, l’ambassadrice des Pays-Bas au Rwanda, Mme Drs. F.M. de Man, en compagnie de deux membres du Parlement hollandais en visite au Rwanda, est allée lui rendre visite.  

La délégation hollandaise a pu se rendre compte des conditions de détention inhumaines imposées à madame INGABIRE UMUHOZA ainsi qu’un double discours de la part des autorités rwandaises.  En effet, malgré l’insistance de la délégation hollandaise pour que la visite se fasse sans témoin, la direction de la prison a catégoriquement refusé et le directeur de la prison en personne a assisté à la visite. A plusieurs reprises Mme INGABIRE UMUHOZA a dû contredire publiquement le directeur de la prison, comme quand il a osé affirmer que c’était sur demande de Mme INGABIRE UMUHOZA que la fenêtre de sa cellule avait été teintée en noir pour empêcher tout rayon de soleil d’éclairer l’intérieur. La veille de cette visite, la direction de la prison avait enlevé ladite peinture pour sans doute faire bonne figure devant cette délégation. Il en a été de même quand le directeur a affirmé que madame INGABIRE UMUHOZA avait nié le génocide, ce qui est erroné.  
 
La direction de la prison a aussi menti en affirmant que l’avocat de madame INGABIRE UMUHOZA était libre de consulter sa cliente quand il le voulait. Or, le matin du jour de visite de la délégation hollandaise, son avocat, maître GATERA, s’est fait signifier par le RCS (Rwanda Correctional Service) qu’il devait attendre une réponse écrite avant de rencontrer sa cliente. Le RCS n’a pas indiqué à quand cette réponse interviendrait. Une manœuvre qui cache mal l’intention des autorités rwandaises de saboter l’action en justice intentée par madame INGABIRE UMUHOZA contre le gouvernement rwandais auprès de la cour africaine des droits de l’homme et des peuples sise à Arusha.   

Signe que les parlementaires hollandais ont posé des questions gênantes à leurs homologues rwandais, le journal gouvernemental « The new Times » a repris sa campagne de harcèlement médiatique contre Mme Ingabire. Dans un article d’une rare virulence parue le 19 août 2015, sous le titre « We won’t let anyone take Rwanda back », une parlementaire rwandaise, Mme Juliana Kantengwa accuse Mme Ingabire d’avoir prêché le double génocide dans son discours de Gisozi. Distillant une haine ethnique indigne d’un représentant du peuple, Mme Juliana a affirmé sans sourciller que quand madame Ingabire a quitté le pays sous le régime de feu Habyarimana, les « Tutsi n’avaient pas le droit d’aller à l’école » (she left the country at a time when the Tutsi were not allowed to go to school, it was illegal for Rwandan army men to marry Tutsi women, and when she was living in The Netherlands, she never opposed that). Comment prêcher une réconciliation ethnique en distillant une telle intoxication ? Il suffirait à madame la députée de regarder autour d’elle, elle verrait sûrement des Tutsis qui ont fait des études sous ce régime.  
 
Les propos imputés à madame INGABIRE UMUHOZA et qui lui ont valu d’être accusée de négationniste du génocide sont des citations in extenso des rapports de l’ONU suivants : S/1994/1125, paragraphe 146-148, S/1994/1405, paragraphe 181-186, et S/1998/581. Les faits étant têtus, le régime aura du mal à nier l’évidence, à savoir qu’à côté du génocide contre les Tutsis, il y a eu des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité que le rapport S/1998/581 demande de qualifier. Toute tentative de réconciliation qui éluderait cette vérité sera vouée à l’échec.  

17.1.2.                     Le 1er Vice-Président du parti FDU INKINGI


Le Premier Vice-Président Twagirimana Boniface a échappé à une tentative d’enlèvement par des agents de sécurité en tenue civile le 5 Décembre 2015. Il fut sauvé par le public au moment où ses assaillants essayaient de le faire entrer par force dans leur véhicule. Les membres du public l’ont accompagné à la police où il était interrogé sur les interviews qu’il avait données aux agences de presse étrangères et puis relâché. N’eut été l’intervention du public il aurait disparu. La Police avait nié, pendant plus de 24 heures, avoir une information quelconque sur sa disparition.

Pour avoir continué à dénoncer les injustices au Rwanda et s’être opposé à la révision de la Constitution, il croupit désormais en prison depuis le 6 septembre 2017 sous accusation mensongère de recruter des combattants pour une organisation armée fictive.

17.1.3.                     Le secrétaire général du parti FDU INKINGI  


Monsieur Sibomana Sylvain, secrétaire général du parti, est en prison pour avoir critiqué la politique du gouvernement. Cela a été considéré comme un crime et il a été jugé et condamné à 8 ans de prison ferme pour incitation à la révolte et menace contre l'ordre public. 

 Depuis le 5 août 2015, il n'est plus autorisé à bénéficier du régime alimentaire que lui a prescrit le médecin de l'hôpital (ordonnance médicale n°1003/08/2014). 

Mr Sylvain Sibomana et un collègue, Dominique Shyirambere ont été arrêtés devant la cour suprême de Kigali, le 25 mars 2013, alors qu’ils s’apprêtaient à assister aux audiences du procès en appel de madame Victoire Ingabire. Le 10 avril 2013, la Haute cour de Gasabo avait ordonné qu’ils soient mis en détention provisoire pour une période de 30 jours, jugement contre lequel les suspects avaient fait appel. La cour n’a jamais fait suite de cet appel, jusqu’à leur convocation, le 10 juin 2013 pour comparaître le 13 juin 2013, longtemps après l’expiration du délai de détention provisoire. Le ministère public fonde ses allégations en tout et pour tout sur un badge portant une photo de madame Victoire Ingabire, ainsi qu’un T-shirt arborant l’inscription “Démocratie”. Monsieur Shyirambere Dominique a été libéré, puis porté disparu.

17.1.4.                     Mlle Léonille GASENGAYIRE, Trésorière Adjointe du parti FDU INKINGI


Mlle Gasengayire fut kidnappée à l’intérieur de la prison centrale de Kigali, par un véhicule immatriculé RAA 442 M, alors qu’elle apportait dans les heures de midi de la nourriture à Madame Victoire INGABIRE UMUHOZA, prisonnière politique et présidente des FDU INKINGI. Les agents de sécurité à bord du véhicule ont forcé Madame Gasengayire à entrer dans le véhicule, et puis ils sont sortis de la prison pour une destination inconnue. 

En dépit des recherches et tentatives de renseignements effectués auprès du Département de Recherches criminelles (CID ou Criminal Investigation Department), celui-ci avait complètement nié la présence de Madame Gasengayire Léonille dans son enceinte. Trois jours après, soit le 28 mars 2016, Madame Gasengayire fut libérée. Elle nous expliqua qu’elle se trouvait bel et bien en train de subir des interrogatoires dans les services du Département CID.

Celle-ci a été de nouveau arrêtée le 23 août 2016 dans sa famille de Kivumu à Rutsiro et incarcérée à la station de police sans un mandat d’arrêt. Celui-ci ne lui sera délivré que huit heures plus tard sur base de l’article 463 du code pénal qui sanctionne la provocation du soulèvement ou des troubles de la population et restreint encore plus la liberté d’expression des opposants en récriminant de manière extensive la diffusion de tous « faux bruits (…) contre le Pouvoir établi ». Les juges ont finalement pris leur courage en mains et l’ont libérée. Dans tous les interrogatoires les agents de sécurité lui demandaient toujours d’abandonner le Parti FDU-Inkingi et rejoindre le parti au pouvoir.
Le 6 septembre elle a été arrêtée pour la quatrième fois sous les mêmes chefs d’accusation que le 1ier Vice-Président.

17.1.5.                     Les commissaires Fabien Twagirayesu, Gratien Nsabiyaremye et le responsable des FDU dans la ville de Kigali Theopile Ntirutwa 


Ces responsables du FDU-Inkingi sont aussi accusés des mêmes chefs d’accusation que le 1ier Vice-Président.

Monsieur Théophile NTIRUTWA, représentant local des FDU-Inkingi dans la ville de Kigali, avait été enlevée en date du 18/09/2016 vers 23h. Enlevé alors qu’il rentrait chez lui à moto, il fut bandé des yeux, puis emmené à un endroit secret où il fut sauvagement torturé pendant plusieurs jours et fut relâché.  Il fut de nouveau arrêté par la police le 6 septembre 2017 mais déclaré “porté disparu” pendant deux semaines. Par la suite, la police l’a fait réapparaître pour rejoindre les autres membres de l’équipe actuellement en détention. Ce fut de même pour Mr Abayisenga Vénant.

Suite à une forte médiatisation, ils ont finalement été retrouvés entre les mains de la police. Ils avaient été enfermés dans des cellules très étroites dans lesquelles ils étaient restés menottés vingt-quatre heures sur vingt-quatre mais la police avait déclaré ne rien savoir de leur disparition. Pourtant c’est elle qui les avait arrêtés au vu et au su de tous. La police avait complètement nié leur présence entre ses murs.

17.2.     PS IMBERAKURI

Maître Bernard NTAGANDA, Président du PS IMBERAKURI, a pu faire enregistrer le parti PS IMBERAKURI officiellement en juillet 2009. Ce défi de faire enregistrer le premier parti d’opposition au Rwanda lui attira les foudres du FPR au pouvoir. Ne pouvant pas le manipuler comme le sont les partis satellites du FPR réunis au FORUM des partis du Rwanda, le FPR se lança dans une longue bataille pour anéantir et/ou détruire complètement le PS IMBERAKURI ainsi que toute opposition politique au Rwanda. Le FPR eut recours notamment : aux licenciements abusifs des leaders du PSI, l’immixtion dans les organes du parti visant à créer une faction à la solde du FPR, intimidations via notamment la commission politique du Sénat, les emprisonnements et les disparitions des leaders. C’est ainsi que :

Le 24 juin 2010, soit le premier jour d’enregistrement des candidats pour les élections présidentielles du 09/08/2010, Me Bernard NTAGANDA fut arrêté à l’aube chez lui. Rappelons qu’il avait été élu le 25/10/2009 par le congrès de son parti pour le représenter dans ces élections.

Ce même 24 juin 2010, près de deux cents personnes, membres du PSI et FDU Inkingi ont été arrêtées, certaines brièvement afin de stopper la manifestation prévue ce jour pour réclamer l’ouverture de l’espace politique. Mais, d’autres comme M. Théobald MUTARAMBIRWA, secrétaire général du PSI fut libéré deux semaines après sans dossier, alors que Me Bernard NTAGANDA fut traduit en justice et condamné à quatre ans de prison. Tant à la haute cour (11/02/2011) qu’à la cour supreme (27.04/2012), il n’a jamais été autorisé à présenter les témoins à décharge. Après de rudes conditions de détention, souvent en isolement, il a été libéré le 04 juin 2014 ;

En juillet 2010, d’autres responsables ont été arrêtés et condamnés à des peines diverses. On note notamment les cas de M. Sylver MWIZERWA, porte-parole, condamné à trois ans de prison, M. Dominique SHYIRAMBERE, responsable du parti dans le District de Gabo à Kigali, Donatien MUKESHIMANA, chef du protocole et M. Célestin YUMVIHOZE, membre. Ces trois derniers ont été condamnés à deux ans de prison, chacun ;

Comme souligné au point 1.4 paragraphe 4 ci-haut, M. Jean Baptiste ICYITONDERWA secrétaire général du PSI chargé de la mobilisation a été libéré ensemble avec ses collègues après que le tribunal les avait blanchis sur tous les actes d’accusation. Cependant, début Novembre 2013, il fut de nouveau arrêté par la police l’accusant de faux et usage de faux, disant que certains pétitionnaires n’existent pas. Sans que ces soi-disant pétitionnaires fictifs ne soient présentés au tribunal, la Haute cour de Gasabo l’a condamné à six ans de prison. Il est actuellement en appel. Or, le Premier Ministre lui-même à qui la lettre de pétition était adressée a reconnu son bien-fondé et le gouvernement a revu sa copie et a octroyé le droit d’accès aux conditions de financement (à crédit) des bourses d’études à plus de 10.000 étudiants sur près de 13.000 qui en étaient dépourvus.

17.3.     PDP IMANZI  


Monsieur Déo MUSHAYIDI, président de PDP IMANZI, parti d'opposition au régime du FPR au pouvoir, est aussi en prison. 

17.4.     RWANDA NATIONAL CONGRESS - RNC 


Le colonel Patrick KAREGEYA, membre fondateur du parti, a été assassiné le 1er janvier 2014. Le général KAYUMBA NYAMWASA, membre fondateur du parti, a par deux fois, été victime de tentatives d'assassinat. 

16.5 Le Parti démocratique vert (GREEN PARTY)  


Monsieur André KAGWA RWISEREKA, alors vice-président du parti démocratique vert (GREEN Party), a été assassiné en juillet 2010, et à ce jour, les auteurs de ce crime n'ont pas encore été traduit en justice.
 

16.6 Cas de la famille Diane RWIGARA

Candidate à la dernière élection présidentielle, actuellement en prison avec sa mère Adeline. Le père de Diane, RWIGARA Assinapol, était un industriel qui fut un grand financier du FPR avant sa prise du pouvoir en juillet 1994. Selon la police, il est mort d’un accident de véhicule mais selon la famille, il a été assassiné par la police le 4 février 2015.

Opposante à Paul Kagame, Diane Shima Rwigara n’avait pas pu présenter sa candidature pour l’élection présidentielle du 4 août 2017 car elle en avait été exclue sous-prétexte de faux et usage de faux concernant les listes de soutien requises pour l’admission à déposer la candidature.

A la fin du mois d’août un oncle a annoncé que les membres de la famille Rwigara, à savoir Diane Rwigara, Anne Rwigara et leur mère Adeline Rwigara, avaient été emmenés par les forces de l’ordre dans un lieu inconnu. Elles avaient été portées disparues alors qu’elles étaient toutes enfermées chez elles, à leur domicile, menottées 24h sur 24 par la police, une ou deux semaines sans avoir de leurs nouvelles.

Pendant les trois premières semaines de septembre 2017, elles subissent des interrogatoires au Centre d’investigation criminelle (CID) et placées en garde à vue le 22 septembre 2017. La police leur reproche l’incitation à l’insurrection alors que lors de leur arrestation, elles étaient poursuivies pour l’évasion fiscale.

Après leur comparution devant le tribunal, Diane est maintenue en détention provisoire pour « atteinte à la sécurité de l’Etat » et « faux et usage de faux » ; sa mère reste également en détention provisoire pour « atteinte à la sécurité de l’Etat » tandis que sa sœur Anne est mise en liberté provisoire mais reste également poursuivie pour atteinte à la sécurité de l’Etat.


18.  Les violations aux droits économiques sociaux et culturels


Monsieur David MEPHAM de Human Rights Watch, dans son article "Développement et droits humains : intégrer les droits dans un programme pour l'après 2015", écrivait :   

 " Avant que n'éclate le soulèvement populaire en Tunisie fin 2010, de nombreux membres de la communauté internationale considéraient ce pays comme une success story dans le domaine du développement. La croissance économique y avoisinait les 4%, neuf enfants sur dix fréquentaient l'école primaire et l'espérance de vie y était de 75 ans, un chiffre impressionnant. 

Mais pour de nombreux tunisiens, ces progrès étaient de toute évidence insuffisants :
des revenus plus élevés et un meilleur accès aux services publics ne faisaient pas oublier les maux et les coûts associés à la corruption, à la répression, aux inégalités et à l'impuissance. Ils ne satisfaisaient pas non plus les aspirations des tunisiens à une justice, des libertés et une dignité meilleure

En janvier 2011, après 23 années de pouvoir, Zine el-Abidine BEN ALI a été chassé de la présidence par des manifestations populaires. 

Si la lutte menée par la Tunisie pour devenir une démocratie respectueuse des droits se poursuit, son expérience récente met en exergue l'inadéquation et la faible portée de nombre des stratégies actuellement dédiées au développement. Par ailleurs, elle montre indubitablement la nécessité de recadrer le développement dans un contexte plus large, en ne tenant pas uniquement compte de la hausse des revenus (même si ce critère est important), mais aussi de l'instauration de conditions qui permettent à tout un chacun, n'importe où, de s'instruire, d'aller chez le médecin, et de consommer de l'eau potable; et également de s'exprimer librement, d'être protégé par un système de justice équitable et accessible, de participer au processus décisionnel et de vivre sans craindre de faire l'objet d'abus ou de discrimination

Autant de droits économiques, sociaux, culturels, civils et politiques fondamentaux que les gouvernements sont tenus d'honorer mais qu'ils refusent en réalité à des centaines de millions d'individus". 

Cet exemple de la Tunisie que décrit si bien David MEPHAM, nous amène à examiner la situation relative aux violations des droits économiques, sociaux et culturels au Rwanda. 

18.1.     L'arme de la faim et les politiques économiques désastreuses

Les rwandais, surtout en milieu paysan défavorisé, continuent à pâtir des orientations économiques hasardeuses qui ne font la part belle qu'aux plus nantis. Ainsi, dans le domaine de l'agriculture, la politique de la monoculture imposée sur tout le territoire national crée, dans certaines régions, une situation de famine chronique et provoque l'exode rural. Cette politique est appliquée en ce qui concerne les champs et petites plantations des habitants sur les collines du Rwanda. Les autorités chargées de l’agriculture ont déterminé, sur base d'études pédologiques douteuses, quelle plante doit être cultivée dans chaque région du Rwanda.  

Ainsi, selon qu’ils habitent une localité du pays, les paysans sont obligés de ne cultiver, en coopérative, qu’une seule plante et de compter que sur les autres régions pour acheter les autres produits agricoles dont ils ont besoin.  Ce qui affame la population, c'est le rapport entre le prix de vente des denrées alimentaires produites localement et le prix d'achat des denrées importées d'autres régions. "On nous achète notre maïs à un prix dérisoire alors que la pomme de terre et le riz nous sont vendus à des prix exorbitants", s'est plaint Matthieu HABIMANA, un habitant de Gitarama. Mais les dirigeants et les nouveaux riches de Kigali se bornent à vanter les mérites d'une politique absurde qui ne cesse de faire des morts dans les rangs des couches les plus fragiles de la population !   

En plus de l'imposition d'une politique de monoculture, qui s'est accompagnée, dans certains coins du pays, d'une campagne de destruction d'autres cultures, la mise en application de la loi sur la redistribution des terres est clairement destinée à cautionner la spoliation des terres des pauvres sans défense au profit de ceux qui sont au pouvoir et des riches. Cette politique change les campagnes du Rwanda en poudrière où une petite étincelle pourrait provoquer un embrasement général. Dans tous les cas, la population considère cette imposition de la monoculture ainsi que la politique de spoliation des terres comme une façon que le pouvoir a trouvée pour affamer ses citoyens.

18.2.     L'outrage au droit de propriété et les stratégies de spoliation   


En vertu de lois inéquitables sur l’expropriation pour cause d’utilité publique, le gouvernement rwandais a fait adopter et applique une politique cruelle qui exproprie les populations et les laisse dans le dénuement total. Ces expropriations, qui foulent totalement au pied le principe sacré du droit de propriété, favorisent les riches qui peuvent, à coup de millions, supplanter les moins favorisés qui sont obligés d'aller recommencer plus loin leurs tentatives de survie. Cette vision erronée du développement fait des ravages, surtout dans la capitale Kigali. Les différents quartiers de la ville sont, à tour de rôle, l’objet de cette véritable chasse-aux-pauvres qui consiste à obliger les propriétaires d’habitations à les détruire, à leur frais, pour y ériger des maisons « cadastrées » selon le plan type donné par les autorités en charge de l'urbanisme et des bâtiments civils.  

 Pourtant, ces habitations sont la propriété exclusive des habitants qui ont un titre de propriété et avaient obtenu, au départ, l'autorisation de bâtir à cet effet. Le gouvernement ayant remplacé le « Titre de propriété » par un simple « Acte de notoriété », un propriétaire devient, du jour au lendemain, locataire de sa propre terre et de son propre logement. La terre appartient, désormais, à l’Etat qui prend plaisir à la distribuer aux plus nantis quitte à faire déguerpir les habitants moins favorisés. Le prix de l’expropriation, qui ne porte que sur la valeur estimée de la maison sur pieds, est toujours insignifiant par rapport au coût réel d’une nouvelle construction. Le gouvernement donne souvent quelques mois de délai de grâce au cours duquel les propriétaires doivent avoir fini de détruire leur maison ; et lorsque ce délai arrive à échéance, ce sont les Caterpillar de l’Etat qui arrivent et détruisent les maisons au plus grand désespoir des habitants qui, en plus, doivent supporter les factures des travaux de démolition de leur propriété.   

Une récente illustration de cette injustice est venue étayer ce propos : l'"affaire RWIGARA". Assinapol RWIGARA, un ancien commerçant prospère et financier du FPR qui a trouvé la mort en février lors d'une collision entre sa voiture et un camion à Kigali. Un accident selon la police, un assassinat pour la famille. En août dernier, Adeline RWIGARA, la veuve de l'homme d'affaires a accusé par voie de presse le gouvernement de Kigali de harcèlement, de vouloir s'approprier ses biens après avoir assassiné son mari. Par la suite, elle a été brièvement arrêtée pour « incitation au soulèvement », puis convoquée et interrogée à plusieurs reprises, sans suites judiciaires pour le moment. L'objet du litige : un bâtiment situé en plein cœur de la capitale à deux pas de la résidence présidentielle. Un immeuble d'habitation appartenant à l'homme d'affaires Assinapol Rwigara  qu'il avait agrandi avec pour objectif de le transformer en hôtel. Mais en juillet dernier, à la suite d'un audit ordonné par la municipalité et suivi d'un rapport, la famille du défunt est informée qu'une partie du bâtiment n'est pas en conformité avec les normes et a été construite sans permis. Elle doit donc être détruite. Une décision à laquelle s'oppose la famille qui, selon maître Janvier Rwagatare, son avocat, assure détenir un permis de construire. Elle réclame donc des éclaircissements à la municipalité et a déposé une requête auprès du tribunal de grande instance pour suspendre cette décision jugée précipitée. Me Janvier Rwagatare : « Le rapport [à la suite de l'audit de la municipalité] repose des problèmes de solidité effectivement mais il ne donne pas pour instruction de démolir. Je crois que c'est hâtif. En général, les autorités vous disent de corriger et si vous ne corrigez pas, s'il n'y a pas d'autres moyens, il y a effectivement démolition. »  

La famille avait récemment dénoncé un harcèlement des autorités, visant selon elle à s'approprier les différents biens de l'homme d'affaires. Le maire de Kigali n'était pas disponible dans l'immédiat pour répondre aux questions de RFI mais il a toujours démenti ces accusations, assurant que la municipalité ne faisait que suivre des procédures légales. 

Le Cas de Mr Tribert Rujugiro Ayabatwa[8], ancien argentier du FPR, son immeuble WTC fut d’abord confisqué durant des années par le FPR qui en récoltait les loyers, puis vendu aux enchères pour une somme dérisoire au bénéfice des acheteurs occultes.

Outre que des biens et propriétés des réfugiés soient vendus aux enchères sur base de procès fictifs de Gacaca, les biens et propriétés privés des exilés présumés coupables de génocide séquestrés[9] par ‘l’Etat   sur base de la loi rwandaise n0 39/2015 du 22/08/2015 portant gestion des biens abandonnés est entrée en vigueur depuis le 16/10/2015.

a)    La loi d’août 2015 portant gestion des biens abandonnés marque une dangereuse régression par rapport à la loi ad hoc de décembre 2004. Foulant au pied les principes sacrés des droits de l’homme à savoir : le caractère sacré du droit de propriété et l’intangibilité du patrimoine de l’individu, l’individualité de la responsabilité pénale et la présomption d’innocence, cette loi devrait être purement et simplement abrogée ;
b)    Exiger que les Rwandais réfugiés dans différents pays procèdent devant les autorités diplomatiques rwandaises dans leur pays d’accueil est, en définitive, un piège hautement perfide, étant donné qu’un réfugié n’est pas autorisé à entrer en contact avec les autorités de son pays à moins qu’il cherche à renoncer à son statut de réfugié ;
c)    Etant donné que le patrimoine de l’individu est une part entière de sa personnalité, il y a lieu de déplorer la tendance actuelle à priver les Rwandais du droit à la propriété par l’adoption récurrente de mesures de politique et de conjoncture qui arrachent à la population des biens reçus en héritage et qui devraient aussi meubler le quotidien des descendants ;
d)    Les difficultés financières du Rwanda trouveront la solution non pas dans l’écrasement de la population ni dans le pillage des peuples voisins encore moins dans l’instrumentalisation du génocide en vue d’extorquer des capitaux aux pays étrangers, mais dans le travail et la créativité des Rwandais, la bonne gestion et le partage équitable de l’avoir national ;

19.  La traque, le meurtre et le rapatriement forcé des réfugiés   


Le droit international auquel a librement souscrit le Rwanda, autorise à toute personne qui est persécuté dans son pays ou est menacée de l’être d’aller demander asile dans d’autres pays. Des milliers de rwandais ont trouvé refuge dans différents pays depuis la fin de la guerre en 1994. Mais le gouvernement rwandais qui considère comme une menace le fait que des milliers de rwandais restent en exil, a adopté toute une série de stratégies, dont la plupart relèvent de la violation du droit international, pour rapatrier de force les réfugiés et attenter à la vie de ceux qui refusent de rentrer de force. Au cours des mois de décembre 2014 et janvier 2015, le camp de NAKIVALE en Ouganda a subi une série d’attaques meurtrières. Lesdites attaques ont été menées par des éléments des forces de l’ordre ougandaises, mais en collaboration avec les agents rwandais. Dans la nuit du 19 au 20 décembre 2014, vers minuit, le camp de Nakivale a été attaquée, une trentaine de réfugiés ont été arrêtés et amenés, à bord de véhicules UA 851 N et UAU 642 X, dans la localité dite Isingiro et d’autres à une destination inconnue.   

Beaucoup de réfugiés ont été battus et blessés et leurs familles sont restées traumatisées par la violence de cette attaque. Des informations concordantes ont affirmé, à, chaque fois, que des agents secrets envoyés par le gouvernement rwandais, ainsi que des éléments de la DMI, ont commencé par noyauter le camp et, au moment même des différentes attaques, ces éléments opérant pour le gouvernement rwandais ont joué un rôle de premier plan au cours des opérations. Les attaques ont repris fin janvier 2015 où plusieurs réfugiés ont été assassinés et beaucoup d’autres portés disparus. De telles opérations ont toujours été menées en pleine nuit dans le but d’échapper aux yeux et oreilles indiscrètes des ONG humanitaires et du CICR opérant dans la localité. Depuis la création au Rwanda d’un Ministère chargé du rapatriement forcé des réfugiés, de telles attaques ont été fréquentes.   

La tragédie des réfugiés rwandais en Ouganda n’est pas isolée. Dans différents autres pays, en Zambie, au Malawi, au Burundi des cas d’attaques organisées des réfugiés en vue de leur rapatriement forcé ont eu lieu. Dans les pays occidentaux, les réfugiés subissent aussi des persécutions de la part du gouvernement rwandais. C’est ainsi qu’aussi bien en Grande Bretagne, en France, en Belgique et aux Etats Unis, on a assisté à un activisme effréné des agents secrets du gouvernement rwandais qui, souvent en toute impunité, ont agressé des réfugiés ou demandeurs d’asile rwandais.  
Par ailleurs, une grande campagne diplomatique et médiatique a été mise en route par le gouvernement rwandais pour appeler les instances internationales à décider la cessation du statut de réfugié pour les rwandais. C’est ainsi qu’au cours des deux dernières années, certains pays ayant cédé aux mensonges et au chantage de Kigali ont mis en exécution l’accord de cessation de réfugiés. Or, l’actualité événementielle quotidienne et les rapports des organisations internationales des droits humains attestent que le Rwanda est loin d’être un Etat de droit. Ceux des réfugiés rentrés au Rwanda n’ont pas vu concrétisées les promesses de soutien à la réinsertion.

20.  L'institutionnalisation de l'exclusion  


En date du 30 juin 2013, le Président du Rwanda Paul KAGAME a tenu des propos très durs et scandaleux devant des centaines de jeunes réunis dans un stade de Kigali dans le cadre d’une campagne baptisée : « Youth connect », sous la houlette de Madame Jeannette KAGAME, épouse du Président de la République Rwandaise. Le président KAGAME a clairement fait comprendre qu’il entend désormais prendre la jeunesse rwandaise en otage, d’une part en culpabilisant les jeunes Hutus pour des crimes qu’ils n’ont ni commis, ni connus et, d’autre part, en appelant les jeunes tutsis à se méfier toujours de leurs compatriotes hutus.  

Paul KAGAME a également affirmé que les Hutus n’avaient pas le droit naturel et inaliénable de vivre au Rwanda et que, s’ils y vivent encore, c’est grâce à sa seule bienveillance. En effet, dans son envolée délirante, il a révélé qu’il lui a fallu beaucoup de mansuétude de sa part pour permettre que les Hutus vivent encore au Rwanda. C’est pourquoi, toujours selon lui, les Hutus devraient à jamais se sentir coupables et que chaque génération devrait faire le « mea culpa » au nom de la génération précédente. Ceci s’est traduit concrètement, séance tenante, par une séance particulièrement cynique pendant laquelle des enfants Hutu préalablement choisis pour la circonstance, se sont livrés devant les micros et les caméras de la presse à une séance de pénitence en demandant pardon, au nom de tous les Hutus, pour les crimes de génocide que, clamaient-ils, leurs parents auraient commis contre les Tutsis ! Très choquante, cette campagne et les propos divisionnistes et racistes tenus par un homme politique qui, comme chef de l’Etat, devrait plutôt prêcher la concorde entre tous les jeunes rwandais, Hutu, Tutsi et Twa. Campagne de division, de déshumanisation et de haine initiée par Paul KAGAME le 30 juin 2013, qui intervient au moment où le régime de KAGAME clame en même temps que les ethnies n’existent pas au Rwanda, que l’on est Rwandais tout court. Sur base de quel critère ces jeunes sont-ils choisis, étiquetés comme Hutu et obligés de demander pardon ?  

Jusqu’à ce jour, le FPR utilise la victimisation de l'ethnie Tutsi et l'incrimination systématique de l'ethnie Hutu pour créer une haine entre les deux entités. Le paysan rwandais ne fait que s'appauvrir jour après jour. La terreur règne partout. Le FPR a introduit au pays un système de favoritisme ethnique dont les Tutsis sont bénéficiaires naturels. L’aide à l’éducation est une exclusivité des Tutsi collectivement qualifiés de rescapés du génocide, tandis que les fonds destinés à l’éducation des enfants Hutus provenant des familles indigentes (financement du MINALOC, PAM et autres organismes) ont été supprimés vers les années 2005. Les fonds destinés à l'éducation des Tutsis – FARG – sont de leur côté doublés ou triplés.  Parallèlement, le processus de réduction d’accès des Hutus à l'éducation supérieure remonte aux années 2006 avec la catégorisation des avoirs (propriétés foncières, immobilières et ressources monétaires) pour candidats avant l'inscription. Non satisfait par l’adaptation des Hutus à cette pratique, le FPR a finalement tranché sur le sort des étudiants Hutu d'université pour l'année académique 2013-2014 : aucune bourse scolaire, aucun prêt financier. Face à cette pratique diabolique dans l'éducation, les Rwandais ne savent pas à quel saint se vouer et sont convaincus que si rien ne change, la méchanceté et l'hypocrisie du FPR vont jeter le pays dans un gouffre profond.  

21.  L’impunité des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre commis par le FPR 

 

21.1.     Différents rapports dénoncent les crimes du FPR 


L’impunité des auteurs d’actes de torture, d’exécutions sommaires, de disparitions forcées n’est qu’une suite logique de l’impunité assurée des auteurs qui ont commis des actes qui pourraient être qualifiés d’« actes de génocide », de crimes contre l’humanité et des crimes de guerre commis par le FPR.

Aux dires de tous les experts crédibles, l’attentat qui a causé la mort du Président Habyarimana, de son homologue burundais Cyprien Ntaryamira et de leur suite, a été l’élément déclencheur du génocide contre les Tutsi survenu au Rwanda en 1994. Il sied de citer notamment les rapports d’experts tels que celui de Robert Gersony en 1994, le rapport Degni Ségui en juin 1994, Roberto Garreton en 1998 sur la situation des droits de l’homme au Congo, le rapport de Monsieur Maïna KIAI Rapporteur spécial du Conseil des droits de l’homme des Nations unies ? Le rapport préliminaire de l’enquêteur Michael Hourigan et son équipe, le Mapping report des Nations unies sur la RDC pour la période 1993-2003, pour ne citer que ceux-ci.

 Par ailleurs, d’autres experts neutres se sont exprimés dans ce sens (Amnesty International, Human Rights Watch, Avocats sans frontières, le Département d’Etat USA, le Foreign Office Britannique, etc.). Le documentaire « Rwanda Untold Story » de la BBC, que le gouvernement rwandais a tenté sans succès d’interdire, en est aussi une illustration.

Il est inimaginable que tous ces rapports aient été classés sans suite, alors qu’ils répertorient les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité commis par ces dignitaires actuellement au pouvoir au Rwanda, mais qui restent à l’abri de toute poursuite par la justice. Fort heureusement que les crimes de ce genre sont imprescriptibles.

Le peuple rwandais étant dirigé d’une main de fer, aucun rwandais de l’intérieur ne pouvait oser élever la voix pour pointer du doigt un tel ou tel autre crime commis sous le couvert de la haute protection du FPR.

La seule personne qui a osé le faire est Madame Victoire Ingabire Umuhoza, présidente des FDU-Inkingi, prisonnière politique détenue dans la prison de 1930 à Kigali. Elle a été condamnée par les Cours et Tribunaux du Rwanda pour minimisation et idéologie du génocide, et autres crimes similaires inventés par le régime de Kigali. Sa cause reste encore pendante devant la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, sise à Arusha en Tanzanie et au sein de laquelle le Rwanda, partie au procès, a fini par décrocher depuis juillet 2016 un siège de juge en la personne de Madame Marie Thérèse Mukamulisa, qui faisait pourtant partie du siège de la Cour Suprême du Rwanda au moment de la condamnation de Madame Victoire Ingabire Umuhoza à 15 ans de prison ferme.

Il est à rappeler que la poursuite contre les crimes du FPR a fait l’objet de diverses résolutions du Conseil de Sécurité des Nations unies, dont notamment les Résolutions 1503(2003) et 1534(2004) qui réaffirmaient la nécessité de juger les personnes inculpées par le Tribunal Pénal International pour le Rwanda (le TPIR) et fournir l’assistance nécessaire notamment à l’occasion des enquêtes concernant l’Armée patriotique rwandaise.

21.2.     Les causes de non poursuite contre les auteurs des actes de génocide, des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre du côté du FPR


Il y a lieu de se poser la question de savoir pour quelle raison le procureur du TPIR n’a pas poursuivi les crimes commis par le FPR alors qu’ils faisaient partie du mandat du TPIR lors de sa création ?

 La  résolution 955 portant création du TPIR prévoit : « Créé par le Conseil de sécurité agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, le Tribunal criminel international chargé de juger les personnes présumées responsables d’actes de génocide ou d’autres violations graves du droit international humanitaire commis sur le territoire du Rwanda et les citoyens rwandais présumés responsables de tels actes ou violations commis sur le territoire d’États voisins entre le 1er janvier et le 31 décembre 1994 (ci-après dénommé "Tribunal international pour le Rwanda") exercera ses fonctions conformément aux dispositions du présent statut ».

Le journal Le monde du 13.11.2014 publiait un article du professeur français André Guichaoua, sociologue et expert près le TPIR, qui disait : « …D’autres, et notamment les responsables du FPR, auquel le TPIR a accordé une impunité complète, (le) seront nécessairement (jugés) car les crimes liés au génocide, aux crimes de guerre et contre l’humanité sont imprescriptibles. Pour autant bien des épisodes demeurent encore méconnus et il importe de combler l’écart entre l’abondance des données relatives au génocide et au régime Habyarimana, et l’indigence des informations relatives à la stratégie et aux objectifs de guerre du camp vainqueur et de ses soutiens étrangers, une guerre dont ils ont pris et gardé l’initiative pendant quatre années ».

 Le FPR s’attèle à éliminer aujourd’hui toutes les personnes gênantes susceptibles d’être témoins ou détenteurs des preuves des crimes qu’il a commis depuis les années 1990 à ce jour. D’où des extraditions vers le Rwanda des réfugiés Hutu éparpillés partout à travers le monde, consenties par des Etats au régime du FPR, quand bien même ces Etats disposent des compétences universelles pour juger les présumés criminels du génocide.

Il y a lieu de noter la similitude entre les menaces que profère aujourd’hui le Rwanda contre la France, avec celles qu’il a déjà proférées contre le TPIR.
En effet, l’on se souviendra au moins de certains cas de confrontations qui ont marqué les relations conflictuelles entre le Rwanda et le TPIR.

21.3.     Cas de feu Froduald Karamira 

Homme d’affaires, Froduald Karamira était aussi l’un des leaders du parti MDR. Arrêté à Addis Abbaba en Ethiopie, le Rwanda avait demandé son extradition. Le Procureur du TPIR, Richard Goldstone, lança un mandat d’arrêt international contre Karamira. Il en avait le droit car le TPIR, en vertu de son statut (art.8 al.2) avait la primauté sur les juridictions nationales de tous les Etats. Même au stade de la procédure, selon son statut, le TPIR pouvait demander officiellement aux juridictions nationales de se dessaisir en sa faveur.
Au lieu de mettre Monsieur Karamira Froduald à la disposition du TPIR, le Rwanda obtint son extradition, le jugea très sommairement et procéda à son exécution. Aussi, le Rwanda avait-t-il fait fléchir pour la première fois le procureur du TPIR dans le choix de sa politique des poursuites. Il lui a fait comprendre que sans la coopération des autorités rwandaises, le TPIR n’aurait pas pu fonctionner faute d’accès aux témoins situés sur le sol rwandais.

21.4.     Cas de feu Jean Bosco Barayagwiza 

Monsieur Jean Bosco Barayagwiza est un ancien président du parti Coalition pour la défense de la République au Rwanda. Il avait été arrêté au Cameroun et transféré au TPIR à Arusha en Tanzanie. Durant les procédures préliminaires au procès, ses droits avaient été violés au Cameroun. Il interjeta appel contre ces violations. La Chambre d’appel ordonna sa libération le 3 novembre 1999.

Le Rwanda déclara le procureur du TPIR, Madame Carla del Ponte, persona non grata et refusa de lui délivrer le visa pour qu’elle puisse accéder à ses bureaux d’investigation sis à Kigali. Le Ministre de la justice, Jean de Dieu Mucyo, signifia clairement à Madame Carla del Ponte qu’elle ne pourrait être la bienvenue tant que le Tribunal n’aura pas changé sa décision de maintien en détention de Monsieur Barayagwiza.

Au cours de l’audience du 22 février 2000, Madame Carla del Ponte va plaider devant la Chambre d’appel en exigeant d’elle de faire un choix entre revenir sur sa décision de libérer Barayagwiza ou fermer les portes du Tribunal, ce qui aurait comme conséquence de libérer tous les détenus.

La Chambre d’appel changea effectivement sa décision et maintint en prison Monsieur Barayagwiza.
L’un des juges en la personne de Raphaël Nieto-Navia devint dissident, et s’exprima en ces termes :
« Je rejette avec la plus grande vigueur la suggestion selon laquelle, en rendant des décisions, des considérations politiques devraient jouer un rôle persuasif ou directeur, afin de calmer les Etats et d’assurer leur coopération pour atteindre les objectifs à long terme du Tribunal. Au contraire, en aucune circonstance de telles considérations devraient pousser le Tribunal à compromettre son indépendance judiciaire et son intégrité. Il s’agit d’un Tribunal dont les décisions doivent être prises avec la seule intention d’appliquer le droit et de garantir la justice pour les affaires dont il est saisi, et non pas comme étant le résultat de pressions politiques ou de menaces de suspendre la coopération de la part d’un gouvernement en colère ».

21.5.     L’attentat de l’avion du président Habyarimana était de la compétence du TPIR 


D’aucuns diront que le TPIR n’avait pas compétence pour poursuivre les auteurs de l’attentat contre l’avion du Président Habyarimana. Cet argument fut d’abord soutenu par le procureur du TPIR, Madame Louise Arbour suite à la réception d’un rapport préliminaire élaboré par ses enquêteurs. Initialement, l’enquête portait sur les crimes commis dans l’Affaire Bagosora et Crts. Dans leurs investigations, les enquêteurs avaient constaté que l’avion avait été abattu par le FPR et que la responsabilité incombait au président Paul Kagame. Ils avaient même eu l’occasion d’enquêter sur les crimes commis par le FPR durant les mois d’avril à juillet 1994. Après avoir remis leur rapport préliminaire à Madame Arbour, celle-ci félicita l’enquêteur australien Michael Hourigan et son équipe pour le travail consciencieusement accompli avec clarté.

Quelques jours plus tard, Madame Arbour se ravisa, et demanda que le dossier soit classé sans suite. Elle évoqua comme argument que l’assassinat du Président Habyarimana n’était pas dans le mandat du TPIR.

Louise Arbour, dans une récente interview faite au Globe and Mail, dit avoir prévenu sa successeuse Madame Carla del Ponte, que « les investigations ne peuvent être faites qu’à l’extérieur du Rwanda à cause des dangers et des difficultés de travailler à l’intérieur du Rwanda ….. nous travaillions dans un fragile environnement. J’avais beaucoup de problèmes à propos de la sécurité de nos témoins…. Le Tribunal était constamment dans une position conflictuelle avec le président Kagame ».

21.6.     Le dépôt de plainte des familles françaises 


Le dossier de l’attentat contre l’avion du président Habyarimana ayant été enterré par le procureur du TPIR, il a fallu que les familles des victimes françaises saisissent la justice de leur pays pour que des enquêtes s’en suivent. Ce n’est qu’en 2006, que les premiers mandats d’arrêts sont émis par le juge d’instruction Jean-Louis Bruguière contre des dignitaires du régime du FPR. Il s’en est alors suivi une rupture des relations diplomatiques avec la France le 24 novembre 2006.

Il en est résulté une grave crise politique entre les deux pays que le ministre des affaires étrangères Bernard Couchner et le président Sarkozy ont tenté d’aplanir en se rendant à Kigali pour reconnaître que la France a commis des erreurs. Le successeur du juge Bruguière, Marc Trévidic, a donné une nouvelle orientation à l’instruction, si bien que Kigali espérait qu’un non-lieu allait être prononcé.

Mais le général Kayumba Nyamwasa qui était le responsable des services de renseignements, patron de la DMI, actuellement refugié en Afrique du Sud, et y ayant échappé à deux tentatives d’assassinat, a décidé de parler. Il accuse le président Paul Kagame et deux de ses proches, d’être les auteurs de l’attentat. A cet effet, il a acheminé un document notarié aux juges d’instruction ; ceux-ci ont décidé la réouverture du dossier.

Le 31 octobre 2016 le général Paul Kagame annonçait qu’il suspendrait à nouveau et pour bientôt les relations diplomatiques entre le Rwanda et la France.

Le 10 novembre 2016, le Ministre des Affaires étrangères, Madame Louise Mushikiwabo a tenu une conférence de presse pour expliquer aux journalistes que le Rwanda n’a épargné aucun effort pour le maintien de bonnes relations diplomatiques avec la France mais que tous les efforts fournis par le Rwanda ont été balayés d’un revers de main par la France. Que par ailleurs la France a participé au génocide des Tutsi en avril 1994. Raison pour laquelle, outre la liste des 22 militaires génocidaires français déjà publiée par le Rwanda, celui-ci est en train d’élaborer une nouvelle liste des politiciens français qui auraient participé au génocide (voir site en kinyarwanda Bwiza.com du 10.11.2016).

21.7.     L’impunité du FPR décrédibilise le TPIR


Les obstacles ci-dessus énumérés font du TPIR le Tribunal du Vainqueur puisque c’est le FPR qui a indirectement dicté les règles du jeu, s’interposant dans la conduite des procès.  Aujourd’hui encore, il manipule les conditions de détention des personnes jugées, soit acquittées ou ayant purgé leur peine, qui ne peuvent pas rejoindre les membres de leurs familles.

A titre d’exemple, prenons le cas de Monsieur André NTAGERURA 
Acquitté en 2004, Monsieur Ntagerura se trouve encore aujourd’hui le 19 novembre 2017 à Arusha, attendant un regroupement familial qui n’aura jamais lieu puisque la Cour européenne de droits de l’homme (CEDH) a déclaré son dossier irrecevable. Les pays occidentaux ne veulent pas permettre aux hommes acquittés de rejoindre leurs familles et démontrent ainsi qu’ils n’ont aucun respect pour les décisions du TPIR alors qu’ils ont participé à sa création.

 La réhabilitation des personnes acquittées du TPIR fait partie intégrante de l’éducation à la conscience collective du respect des droits de l’homme.

22.   La position de la Plateforme P5

Pour les Plateforme P5, la menace du régime de Kagame de rompre les relations diplomatiques avec la France, est chantage inacceptable. Cette menace visant à garantir l’impunité à Kagame et ses proches est une preuve de plus que le parti au pouvoir, le FPR n’est nullement intéressé par la vérité sur le drame rwandais.

Les Plateforme P5 réaffirment qu’elles s’opposeront à ce que les relations internationales de notre pays servent de monnaie d’échange pour acheter l’impunité à quelques individus, quels qu’ils soient, soupçonnés de crimes de terrorisme.
Nous soulignons que les Rwandais ne souscrivent pas aux menaces de Kagame. Au contraire, ils espèrent qu’à travers ce genre de dossiers, ils obtiendront justice ou, du moins, ils apprendront la vérité sur ce passé qui hante le Rwanda jusqu’à ce jour.

Aussi, en tant que Rwandais, nous refusons de servir de boucliers à de possibles responsables de crime contre l’Humanité et de terrorisme. Et se servir de la diplomatie de notre pays comme monnaie d’échange pour garantir une impunité aux membres du parti qui se maintient au pouvoir par la terreur est tout simplement inacceptable.

Enfin, nous invitons le général Paul Kagame et son régime à répondre devant les Rwandais à la question suivante : « Si les dignitaires du FPR n’ont rien à se reprocher, pourquoi ne veulent-ils pas que la Justice le confirme ? »

P5 encourages tout effort pour rendre Justice aux victimes et rétablir la vérité. Vouloir à tout prix saborder l’enquête française, la seule en cours qui soit indépendante, est une tentative pour étouffer toute vérité sur les responsabilités dans le génocide.
 

23.  CONCLUSIONS 


1.    Les droits de l’homme au Rwanda sont gravement bafoués sous le regard silencieux de la communauté internationale.

2.    Le Rwanda entretient une ambiguïté :
-           D’une part, membre des 47 Etats membres du Conseil des droits de l’homme des Nations unies, le Rwanda se fait passer pour un élève modèle respectueux des droits de l’homme ;
-          D’autre part, derrière ce parfum de baume que constitue le soi-disant respect des droits de l’homme, se cache un visage mensonger caractérisé par l’hypocrisie, le double language et tout un tas d’autres manœuvres machiavéliques.

3.    Un autre facteur joue un rôle déterminant, à savoir la culture de l’impunité :
D’où toutes sortes de violations graves en matière des droits de l’homme dont des exécutions sommaires, des disparitions forcées, de torture et traitements cruels, inhumains et dégradants.

4.    Le peuple rwandais vit dans la peur et dans l’incertitude du lendemain. En effet, la peur tétanise les citoyens, mais surtout les gens torturés de manière qu’ils doivent garder silence après leur torture. S’ils osent s’exprimer, ils vont subir des représailles terribles. Même les membres de famille ne doivent rien savoir.  

5.     Les partis politiques de l’opposition dont les Plateforme P5 en particulier sont devenus la cible de l’œil du cyclone ou du pouvoir occulte qui ne peut tolérer une critique quelconque.

6.    L’impunité des auteurs d’actes de torture, d’exécutions sommaires, de disparitions forcées n’est qu’une continuité de l’impunité de ceux qui ont commis des actes qui pourraient être qualifiés d’actes de génocide, de crimes contre l’humanité et des crimes de guerre commis par le FPR et qui font l’objet de différentes résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies (Rés. 1503(2003), 1534(2004), 2194(2014), etc..) et de différents rapports des Nations unies (Rapport Robert Gersony, rapport Mapping, rapport Degni Ségui, HRW, Amnesty International, Maina, etc.) mais demeurent malgré tout impunis.

Malgré les recommandations du Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU lors de l’examen périodique universel (EPU) de 2011, le Rwanda avait accepté toutes les recommandations émises en matière d'amélioration des droits de l'homme et en avait accueilli d’autres positivement y compris la liberté d’expression, la liberté d’association, l’ouverture de l’espace politique, des réformes du système judiciaire, l’indépendance de la justice et tant d’autres encore. Le parcours de la situation des droits de l’homme au Rwanda, que nous venons d’effectuer ensemble dans le présent document, montre sans ambiguïté que cette situation demeure source de préoccupations persistantes.

23.1.     Concernant les atteintes au droit à la vie et à l'intégrité physique 

-          Il ressort du premier chapitre que la plupart des assassinats énumérés ont été commis avec la participation directe des responsables politiques du régime du FPR au pouvoir, qui se font accompagner par des militaires ou par des milices du FPR ; 
-          Les témoins des scènes criminels sont automatiquement soit éliminés à leur tour, soit obligés de fuir, sinon ils sont mis en détention pour les intimider et s'assurer qu'aucune réclamation ni accusation n'interviendra par la suite ;
-          Les causes pour lesquelles les gens sont assassinés ne sont pas préalablement vérifiées, et peuvent parfois être fondées sur de simples rumeurs ; 
-          Lors de l'arrestation des gens à éliminer, les responsables n'établissent pas de mandats d’arrêt ; seules l'intimidation, la force et la violence leur servent de feuille de route pour faire régner la terreur sur les victimes et leurs proches ;
-          Il n'y a pas de poursuites exercées contre les auteurs de ces crimes.  

23.2.     Concernant la détention arbitraire  


Il y a lieu de constater l'ineffectivité des procédures légales de privation de liberté.  
La loi existe mais elle n'est pas appliquée.  

23.3.     Concernant les restrictions à la liberté d'expression et d'association 


La presse et la Société civile ont été persécutées, affaiblies, menacées, muselées et tuées.    

23.4.     Concernant la violation des droits économiques, sociaux et culturels  


Le gouvernement rwandais prend en otage la jeunesse rwandaise en lui inculquant des notions de discrimination, notamment en incitant les jeunes Tutsis à se méfier de leurs compatriotes Hutus appelés à demander pardon pour des crimes qu'ils n'ont ni commis, ni connus ; 

De même, le gouvernement rwandais a institutionnalisé l'exclusion par la politique de "Ndi umunyarwanda" (je suis rwandais) pour exiger des jeunes hutus des séances de pénitence en demandant publiquement pardon au nom de tous les Hutus pour les crimes de génocide que, disent-ils, leurs parents auraient commis contre les Tutsis. Cette politique est par ailleurs en contradiction avec la négation des ethnies qui, selon le discours officiel, n'existent plus au Rwanda ; 

Le gouvernement rwandais a instauré des systèmes économiques qui créent des inégalités criantes entre les riches et les pauvres (monoculture, expropriation des terres, élevage en stabulation sans possibilité de nourrir les animaux, produits agricoles offerts à des prix dérisoires, frais de scolarité inaccessible à une écrasante majorité de la population, bourses d'études et offres d'emplois aux privilégiés, etc.). 

Par conséquent nous demandons l’appui du Parlement européen dont la plupart des Etats constituent les bailleurs de fonds du Rwanda, pour faire comprendre au Gouvernement Rwandais et plus particulièrement au Président Paul Kagame ce qui suit :


1.    Libérer sans délais tous les prisonniers politiques dont Madame Victoire INGABIRE UMUHOZA, Déogratias MUSHAYIDI, Sylvain SIBOMANA, Docteur Théoneste NIYITEGEKA, Dr MPOZAYO Christophe, Eric NSHIMYUMUREMYI, Jean Baptiste ICYITONDERWA, Kizito MIHIGO, etc. (la liste étant indicative et non exhaustive) ;

2.     Libérer sans conditions toutes les personnes détenues pour délits d'opinion ; 

3.    Clarifier, en partenariat avec le Burundi, l'origine des dizaines de corps retrouvés flottants sur le lac Rweru ; 

4.    Ouvrir l'espace politique à tous les partis politiques de l'opposition ; 

5.    Ratifier la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées ; 

6.    Etablir une législation claire sur les disparitions forcées, qui les considère comme crimes punissables au même titre que les assassinats et autres meurtres du genre ;

7.    Elaborer une législation claire sur l'abolition des traitements cruels, inhumains et dégradants qui sont utilisés pour extorquer des aveux sur des accusations imaginaires ou pour formater des témoins à charge surtout dans des affaires à connotation politique ; 

8.    Enquêter et traduire en justice les personnes responsables d'arrestations arbitraires, de détentions illégales, de disparitions forcées et de tortures ;

9.     Enquêter et traduire en justice les personnes responsables de 30 mille détenus ayant été condamnés par les tribunaux gacaca aux travaux d'intérêt général (TIG) et que le gouvernement rwandais a déclaré "portés disparus" ;

10.  Enquêter et traduire en justice les personnes responsables de la disparition de 16 mille personnes dans la région de Ngororero, "portés disparus" ;

11. Libérer sans délais les 7.099 prisonniers détenus sans dossiers ;

12. S'assurer que personne ne soit condamnée sur la base des informations obtenues par la torture ou d'autres sévices, et que les tribunaux ordonnent sans tarder des enquêtes sur les allégations de torture faites par des accusés ;

13. Renforcer l'indépendance du système judiciaire et empêcher toutes ingérences politiques dans les poursuites judiciaires et les procès, et s'abstenir de telles ingérences ;

14. Ratifier le statut de Rome de la CPI et incorporer dans la législation nationale des dispositions prévoyant une coopération rapide et exhaustive avec la CPI ;

15.  Remettre en liberté les personnes poursuivies uniquement pour avoir légitimement exprimé leurs opinions ;

16. Permettre aux journalistes de vaquer à leurs activités sans intimidation ni entraves ;

17.  Autoriser la chaîne British Broad-casting Corporation (BBC) à reprendre ses émissions en kinyarwanda à l'intérieur du pays ;

18. Remettre sans délais à leurs propriétaires, les biens immobiliers vendus illégalement aux enchères ;

19.  Elaborer des politiques de développement du pays en tenant compte des conditions qui permettent à tout un chacun de satisfaire ses besoins primaires, tout en assurant ses droits fondamentaux de manière à vivre dans la dignité et l'épanouissement.     

24.  RECOMMANDATIONS 


1.    La Plateforme P5 recommandent que le Parlement européen suggère aux Etats membres de proposer au Conseil de Sécurité des Nations Unies la création d’un tribunal ad hoc chargé de juger les crimes contre l’humanité et actes de génocide concernant l’Armée Patriotique Rwandaise.

2.    Les organisations internationales de droit de l’homme comme Amnesty, HRW d’une part et l’Union Européenne d’autre part, n’ont jamais cessé de dénoncer les violations graves des droits de l’homme, et plus particulièrement à travers le procès politique de Mme Victoire Ingabire Umuhoza. Les Plateforme P5 recommandent aux Pays bailleurs de Fonds du Rwanda de faire pression au gouvernement rwandais pour qu’il procède plutôt à l’ouverture de l’espace politique et qu’il libère tous les prisonniers politiques.

3.    La Plateforme demande à la Communauté Internationale, aux pays bailleurs de fonds du gouvernement rwandais, aux organisations internationales des droits de l’homme ainsi qu’à toutes les personnes éprises des valeurs de paix et de démocratie ayant une influence quelconque, de faire pression sur le gouvernement rwandais afin qu’il cesse ses actes  d’intimidation et de harcèlement pour permettre à la population de jouir pleinement de ses droits fondamentaux civiques et politiques garantis par la Constitution rwandaise et par les conventions internationales que le gouvernement rwandais a signées.

  1. Faire pression au gouvernement rwandais pour qu’il renonce définitivement à tous désagréments et persécutions, physiques et morales à l’encontre des membres des PLATEFORME P5, de notre Présidente Mme Victoire INGABIRE et de ses collaborateurs au Rwanda et à l’étranger ;

  1. Condamner et faire condamner les enlèvements, emprisonnements arbitraires et disparitions forcées contraires aux instruments internationaux tels que la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées ;

  1. Œuvrer de manière à ce que les camps militaires ne deviennent plus jamais des lieux de détention de civils ;





When the Security Council discussed sending a larger peacekeeping force to Rwanda with a broader mandate to protect civilians, the RPF feared that the force might interfere with its goal of military victory. Its leaders may have been particularly concerned that the French might use the force to protect the interim government. Instead of welcoming the move and urging speedy implementation, the RPF spokesman in Brussels opposed it and asserted that there were no more Tutsi to be saved.25 On April 30, Gerald Gahima and Claude Dusaidi of the RPF political bureau reiterated this position in a slightly less forceful statement which declared:The time for U.N. intervention is long past. The genocide is almost completed. Most of the potential victims of the regime have either been killed or have since fled.
The statement continued:Consequently, the Rwandese Patriotic Front hereby declares that it is categorically opposed to the proposed U.N. intervention force and will not under any circumstances cooperate in its setting up and operation. In view of the forgoing [sic] the Rwandese Patriotic Front:
a. Calls upon the U.N. Security Council not to authorize the deployment of the proposed force as U.N. intervention at this stage can no longer serve any useful purpose as far as stopping the massacres is concerned.26